Roland Narboux - l'avion Transall C 160 - Bourges

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L'AVION Transall FABRIQUE A BOURGES
Par Roland NARBOUX

L'Histoire de l'avion Transall C 160 fabriqué à Bourges, premier exemple de coopération franco-allemande

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Version 2009

 

De manière régulière, la presse et la télé nationale mentionnent "que l'aide humanitaire envoyée au Ruanda a été faite à l'aide de 2 Transall de l'armée française". Autre dépêche, quelques jours plus tard : "des soldats français ont été envoyés au Kosovo à bord de 3 Transall pour tenter de mettre un terme aux affrontements qui ont fait plusieurs dizaines de victimes civiles", puis c'est au lendemain d'un tremblement de terre qu'un Transall a livré "plusieurs tonnes de médicaments".
Au fait, cet avion Transall, d'où sort-il ? Quant a-t-il été fabriqué et à quelle époque ? Bien peu d'entre nous sont capables de dire haut et fort que cet avion est typiquement berrichon, il est sorti des usines de Bourges, et aussi de Châteauroux !

 

 

Comme pour la commémoration des 600 ans de la naissance de Charles VII, l'Encyclopédie de Bourges ne pouvait pas laisser passer 2004 sans évoquer cet avion Transall qui est le premier grand projet industriel franco-allemand issu des accord politiques entre De Gaulle et Adenauer en 1964. Il fallait alors un symbole de la grande réconciliation et de la coopération "franche cette fois" vingt ans après la dernière guerre qui avait vu s'opposer ces deux pays. La réconciliation devait se produire aussi sur le plan de l'industrie.

Un avion venu de nulle part ?

Rendre à Bourges et aux berrichons ce qui leur revient, ce n'est jamais simple. Pour cette commémoration, tout commence à Paris, en 2002, au siège de ce qui était Aérospatiale à la grande époque. Claude Mouchy, alors Président de l'Amicale des retraités de l'usine d'avions et de missiles de Bourges, avait reçu une convocation afin de discuter du patrimoine historique dans le domaine de l'aéronautique. Ne pouvant se rendre disponible il m'envoya à cette réunion, pour l'intérêt que je portait à l'Histoire de Bourges et aux avions.
Au cours de cette réunion qui rassemblait des personnes des nouvelles sociétés en cours de fusion, Aérospatiale, Matra, EADS, MBDA…. Etc, il fut question d'écrire un livre sur la coopération franco-allemande dans le domaine industriel, et une personne sensible au Patrimoine aéronautique, suggéra qu'ils avaient pensé au Transall.
Et là, commença une discussion sur le Transall, avion mythique, qui volait toujours et qui….. avait été fabriqué à Toulouse ! J'étais un peu étonné par la tournure des débats, ayant commencé ma carrière d'ingénieur à Bourges sur la chaîne d'assemblage du Transall, c'était en 1968 . Je demande la parole et je signale que le Transall a été fabriqué pour la France, essentiellement à Bourges. Il y eut un peu de flottement, et plusieurs personnes furent étonnées de mon propos, mettant en doute ma parole. Fort heureusement, le représentant de Méaulte petite usine d'aviation de Picardie me vint en aide, et confirma, "Ah, oui, je me souviens, on envoyait nos sous-ensembles à Bourges et l'avion était effectivement monté la-bas pour être mis en ordre de vol, souvent le premier vol emmenait l'avion à Châteauroux".

Ouf, l'honneur du Berry était sauf, mais cette anecdote démontrait que pour le milieu aéronautique français, le Transall, comme tous les autres avions en France ne pouvait sortir que des chaînes d'assemblage de Toulouse. Il est vrai que la dernière tranche des 25 Transall a effectivement été réalisés par cette usine de Toulouse alors en perte de vitesse, occultant ainsi la part prépondérante prise par Bourges.

Un avion franco-allemand : le premier !

La véritable origine du "Transall" se trouve dans l'élaboration, dès juin 1958, d'un programme d'avion cargo militaire de 8 tonnes de charge utile. Deux projets furent finalement retenus, dont celui de Nord Aviation en France et de Weser F.B. en Allemagne.
Le bureau d'études qui allait concevoir le "Transall" était en place avec les hommes du "Noratlas", autre avion-cargo mythique produit à Bourges. Une véritable communauté de travail était installée. Aux firmes Nord Aviation et Weser F.B., s'étaient joints une autre usine d'outre-Rhin appelée Hamburger F.B.

Bourges était alors une des usines phares de Nord-Aviation et va donc tout mettre en place pour construire cet avion. Ce cargo volant fut appelé Transall C 160, ce qui signifiait "Transporteur-Alliance". Un bâtiment pour le montage, de dimension impressionnantes pour l'époque, sera construit à la sortie de Bourges, le long de la route de Châteauroux, il mesure 200 mètres de long et 50 mètres de large, et une hauteur pouvant recevoir "la queue de l'avion" qui n'entrait dans aucun local construit à cette époque.
En une année tout est prêt, et le 25 février 1965 le premier Transall, piloté par Lanvario, avec à ses côtés Morville, atterrit pour la première fois à Bourges. Un an plus tard, le premier avion sorti des chaînes berruyères effectue son premier vol. Cette activité, outre son intérêt sur le plan technique, aura une influence énorme sur le comportement des employés qui apprendront, souvent avant les autres, à coopérer avec l'Allemagne sur de grands projets industriels.

Au total, il sera construit 56 avions complets et 169 voilures pour la série, il faut noter que Bourges n'était qu'une des trois chaînes existantes, les deux autres étant en Allemagne. Le dernier Transall sera livré le 12 janvier 1973.

Les anecdotes des anciens

Comme le rappelle un ancien, des sous-traitants parisiens venaient chercher du travail à Bourges, car les usines du département ne pouvaient pas suffire aux charges de travail sur le Transall et il fallait faire appel à des entreprises plus lointaines. Parfois les interlocuteurs venant de Paris étaient déroutés par le vocabulaire utilisé localement. Les mots berrichons étaient du style : "la pièce doit être en "cul de bateau" et non pas en "toit de chiot", et encore moins en "roue de berrouette".
Le tout avec un fort accent berrichon….. Alors inutile de parler de la traduction nécessaire avec les ouvriers et techniciens allemands qui venaient en Berry pour des retouches ou évoquer des problèmes techniques.

La vie dans une usine était faite de travail, particulièrement minutieux et délicat car un avion, ça vole et il faut qu'il soit de grande qualité, il n'y a jamais eu d'accident à Bourges pendant les 12 ans de production. Mais il y avait parfois de bons moments, car la semaine de travail était plus proche de 55 heures que de 35. Et les anciens se souviennent de ces instants particuliers et conviviaux, ça se passe dans les années 1970 : " Il y avait des arrosages, ça se faisait, c'était obligatoire. On avait un poêle, c'était l'hiver, de temps en temps nous allions nous réchauffer autour du poêle. J'avais dit aux copains pour la saint Roger je ne vais pas vous payer à boire, je vous amènerai des harengs! J'en avais apporté 32 et le magasinier les a faits sur le poêle, dans le bâtiment de piste çà se sentait bien".
Et dans la moitié de l'usine régnait une odeur de harengs grillés qui avait remplacée celle de l'huile de coupe utilisées sur les tours et les fraiseuses….

Pendant une douzaine d'années, Bourges et Châteauroux vont vivrent au rythme du Transall, découvrant la coopération franco-allemande sur le terrain, deux décennies après la guerre, qui avait laissé des traces cruelles dans les usines d'avions qui avaient produits, sous la conduite d'une direction allemande très dure, des avions portant la croix gammée.

Le Transall dans le ciel berrichon

Il fallait voir le Transall dans le ciel berrichon, magnifique avion, caractéristique, avec ses ailes hautes, ses deux moteurs et une partie arrières conçues pour larguer en vol des parachutistes ou des camionnettes.
Quand il y avait un ennui en vol, tout le monde était sur le pont !, çà pouvait être un ennui de fabrication, une erreur sur un instrument de bord, des soucis de dépouillement de vol. Les pilotes volaient quand ils voulaient, le jour, la nuit. Un homme de la piste, "un pistard" se souvient : "A Bourges et à Châteauroux , sur les premiers vols, sur le nombre d'années, il n'y a jamais eu de gros problèmes en vol, çà veut dire que la qualité, la fiabilité, c'était quand même quelque chose de performant".

La présence de techniciens allemands à Bourges devenait classique et ne posait plus de problème, ils venaient de Hambourg ou de Brême. L'un de leurs représentants en France, était devenu un vrai berrichon et réglait les problèmes techniques très rapidement : Si on avait un problème , un truc qui ne se montait pas comme une vis trop courte … le jour même il nous trouvait la solution. Alors lui Chapeau !" .
Un autre cadre de Bourges estime que nos relations ont toujours été bonnes, voire amicales : " Et le soir en cours de dîner, certains allemands nous faisaient des confidences. Ainsi l'un d'eux nous racontait son passage à Paris pendant la guerre à l'Arsenal, qui est devenu depuis Nord Aviation Châtillon. Un autre nous a raconté également sa fuite à la fin de la guerre avec son équipe pour le Brésil, puis son retour à Brême pour relancer l'industrie aéronautique allemande."

la chaîne de l'avion Transall à Bourges

Châteauroux recevait le Transall après son premier vol et les essais de piste. Avant la livraison aux armées, françaises ou allemandes ou d'Afrique du Sud, le Transall était peint dans une immense salle située à Déols pour être entièrement peint.

Aujourd'hui, 40 ans après le début de cette commémoration, comment ne pas penser que le succès considérable des fabrications européennes d'Airbus, a commencé, de manière discrète à Bourges. Les berrichons furent des pionniers, ils ne le savent pas ! C'est pourquoi, Transall, qui fut une belle aventure pour des milliers de personnes à Bourges et Châteauroux,.


Ue livre de 160 pages avec beaucoup de photos a retracé l'histoire de cet avion berrichon, écrit par les anciens qui ont vécu ces moments,

A suivre l'actualité avec l'ARCAB, l'association des Retraités et conjoints de l'Aérospatiale de Bourges

http://arcab.bourges.net/ 1 Rue Le Brix - 18000 Bourges.

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