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- LA FRANCE ET BOURGES AU XII e SIECLE
- Au XII e siècle, c'est à
dire entre 1100 et 1200, Bourges est une ville importante. Une
allée critique est 1137, c'est d'abord, le couronnement
du roi Louis VII à Bourges et cette même année,
il épouse Aliénor d'Aquitaine.
Alors que la famine secoue l'Europe, le roi répudie son
épouse qui s'en va se marier avec Henri Plantagenêt,
ce sera le début de toutes nos difficultés avec
les Anglais.... qui durent encore.
En 1165, une entrevue célèbre
se tient à Bourges, entre le Pape et Thomas Becket. Deux
ans plus tard, c'est le concile cathare de Saint Félix
de Caraman.
Philippe Auguste devient roi de France
en 1180 et Richard Coeur de Lion roi d'Angleterre.
En 1187, Philippe Auguste de Bourges envahit
le Berry et poursuit sur l'Aquitaine.
C'est à cette époque que
commence la cathédrale de Bourges et la grosse tour, et
il en profite pour remettre en état et agrandir le rempart
de la ville.
Plus tard, Louis IX sera roi de France,
en 1226 et le restera jusqu'en 1270.
AVANT LA CATHEDRALE
La primatiale romane est commencée
en 1020 par l'archevêque Gozlin, un fils naturel du roi
Hughes Capet. En 1170 la façade restait à construire,
les portails préparés n'avaient pas été
montés. Le roi Louis VII fut sacré dans cette église
en 1137.
A côté du comte de Bourges,
se trouvait un autre personnage redoutable, l'archevêque.
Il était à la tête d'un territoire qui coïncidait
avec celui du comte de Bourges.
LES ARCHEVEQUES DE BOURGES A CETTE EPOQUE
Pierre de la Châtre (en fonction
de 1144 à 1171) fonda des églises, et il acquit
des domaines, tout en réorganisant son diocèse
de Bourges.
Il édifia un nouveau palais archiépiscopal dans
le cloître. Il excella dans la construction des oppida,
templa et domus...
Henri de Sully, fils du seigneur de Sully
sur Loire fut élu archevêque en 1183 (jusqu'en 1199),
sa famille fournit 3 archevêques de Bourges. Il était
riche et porté vers l'autorité et la diplomatie,
c'était un "grand".
En 1199, Henri de Sully est remplacé
par saint Guillaume (1199 - 1210)
Ce Guillaume était un moine cistercien, abbé de
Chaalis. Homme de noble naissance, de caractère pieux,
voué à l'étude et à la méditation,
il s'oriente très vite vers les ordres.
En 1209, alors qu'il se préparait à partir en croisade
contre les Albigeois, il prit froid à une messe (ou un
sermon) dans la cathédrale et mourut en janvier 1210.
On exposa immédiatement son corps dans l'église
et tout le peuple vint pour le vénérer.
(c'est sans doute à contrecoeur , et à la demande
du roi et du pape qu'il se préparait à la croisade
contre les Albigeois)
A sa mort, on lui attribua tout de suite des miracles et des
guérisons, aussi, sa canonisation fut demandée
à Innocent III dès l'année suivante.
C'est une bulle d'Honorius III en 1218 qui en fit un saint. L'enquête
fut menée par deux abbés cisterciens, ce qui facilita
les choses.
Le corps de Saint Guillaume fut ensuite déposé
dans une châsse au fond du choeur juste derrière
le maître autel, pour que les pèlerins qui parcouraient
le déambulatoire puissent le voir.
C'est en son temps que fut achevé
le chevet de la cathédrale.
De 1210 à 1217, l'archevêque
de Bourges était Gérard de Cros, dont on ne sait
rien !
En 1218, un nouveau Sully arrive, c'est
le neveu de Henri, il s'agit de Simon de Sully qui occupera le
siège pendant 14 ans.
Il eut beaucoup de difficultés dans la gestion du diocèse,
et lutta pour la primatie d'Aquitaine qui lui était contestée.
C'était l'époque des croisades des Albigeois, qui
se poursuivait et dont les idées arrivaient aux portes
du diocèse. C'était aussi la croisade pour aller
délivrer Jérusalem.
C'est sous Simon de Sully que fut entreprise la nef de la cathédrale.
Nouvel archevêque en 1236 (jusqu'en
1260 environ), Philippe Berruyer était le neveu de saint
Guillaume
Il semble s'être peu intéressé à la
vie matérielle de son diocèse, il suivait, comme
son oncle le chemin du spirituel.
Lorsqu'il meurt en 1260, le gros oeuvre de la cathédrale
est achevé.
80 années de l'histoire du diocèse
avec deux familles, celle des Sully et celle de saint Guillaume.
Mélange de bâtisseurs et de ferveur religieuse.
Il fallait les deux pour mener à bien un tel chantier.
Le prestige de Bourges était considérable,
l'archevêque avait beaucoup d'influence sur le roi de Franc
et sur le Pape. Il les aidait, sur le plan juridique et financier.
Le nombre de chanoine était de 30
en 1178 et 40 en 1189. Il y avait obligation de résidence,
mais en 1180, par exemple, ils n'étaient que 20 à
Bourges. C'était une fonction très rémunératrice.
Revenus de la terre, le chapitre possédait
aussi des villages (La Celle-Condé, Mareuil sur Arnon...).
L'économie du Berry était agricole, les terres
capitulaires étaient organisées en 4 métairie
administrées par les prévôts qui percevaient
les dîmes.
Le chapitre était puissant et deux
anciens titulaires étaient devenus papes, Lucius III et
Urbain III, il y avait donc un grand prestige de cette compagnie.
INFLUENCE DU ROI ET DE L'ARCHEVEQUE DANS LA CONSTRUCTION
La ville de Bourges à cette époque
avait une population de l'ordre de 15 000 personnes.
C'est le chapitre de la cathédrale
qui est à l'origine de la construction.
Il faut bien voir que la cathédrale
n'avait pas une fonction d'église et de pèlerinage,
il n'y avait pas de relique, ce sera un problème permanent
: trouver et mettre en valeur des reliques. De plus, comme le
dit J.Y. Ribault, la cathédrale ne sert pas à des
assemblées civiles.
Le roi était Louis VII au début
de la construction, s'il fut dit-on, impressionné par
les projets de Pierre de la Châtre, et donna son accord
dans une charte de 1159, on ne connaît aucun document de
la sorte de Philippe-Auguste lors du début de la construction.
Bourges est le premier monument de style
"français", c'est à dire du nord de la
Loire. Le Berry est une enclave royale entre le Poitou et la
Bourgogne et il y a d'excellentes relations entre le roi et le
clergé du Berry.
Les archevêques ont pris une part
prépondérante à la nouvelle cathédrale,
c'est ainsi que Henri de Sully organisa des quêtes. Ils
aidèrent financièrement la construction.
C'est le chapitre qui possédait les terrains et non le
roi ou l'archevêque, c'était donc le maître
d'oeuvre du chantier, c'est lui qui prenait les décisions,
et l'archevêque ne servait que de conseil et d'assistance.
Par la suite, pour trouver des fonds, l'archevêque
Guillaume de Dangeon mit tout en oeuvre dans son diocèse
et fut aidé par Eudes de Sully, qui lui remis un morceau
de la mâchoire de Saint-Etienne et du chantre de Chartres,
Josselin, ainsi que d'autres reliques de moindre importance pour
que les fidèles viennent apporter des offrandes devant
ces reliques et que cet argent serve à la construction
de la cathédrale.
Le chapitre administrait donc la fabrique,
il engageait les architectes et les maçons. Il tenait
les cordons de la bourse avec deux de ses membres.
La fabrique (fabrica ecclese) est mentionnée
en 1201, elle percevait l'argent et possédait les terres,
elle était administrée par un laïque en 1201,
un procurator et un rectore.
QUE VOULAIT LE CHAPITRE ?
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Pourquoi la cathédrale à
Bourges ? Le chapitre voulait construire un monument représentant
son autorité et son prestige, en même temps qu'un
siège digne du primat d'Aquitaine.
Mais il y avait des ambitions identiques dans d'autres diocèses
sans que l'on construisit une cathédrale.
En 1194/95 lorsque l'on étudie le projet, le chapitre
a peut-être demandé que le chevet puisse recevoir
tout le chapitre métropolitain et le bas clergé,
soit environ 200 personnes et que la nef puisse recevoir des
milliers de fidèles. ( A Noyon, il y avait 60 chanoines
et un chevet plus petit qu'à Bourges).
Il y avait, en tout cas à la fin
du XII e siècle, une course au gigantisme, cela se calmera
au milieu du XIII e.
On a dit aussi que Bourges avait un côté
très fonctionnel, par exemple, les chapelles rayonnantes
étaient faites pour vénérer les saints,
dans des autels. De même la place autour de l'autel devait
permettre l'organisation de grandes processions.
Mais d'autres cathédrales devaient répondre aux
mêmes préoccupations liturgiques sans donner les
mêmes éléments de réponse sur le plan
architectural.
Un plan somme toute assez traditionnel,
mais avec des dimensions gigantesques, suivant les voeux du chapitre,
pour permettre à chacun d'être à l'aise,
aussi bien les chanoines que les fidèles. (l'archevêque
avait une porte sur le côté sud du chevet pour aller
directement dans son palais)
L'EMPLACEMENT
La cathédrale était entourée
d'un enclos appelé le cloître, fermé à
l'est par le mur gallo-romain, à l'intérieur il
y avait eu le palais du gouverneur (romain) et l'église
de saint Ursin.
A cette époque, il y avait le palais de l'archevêque,
, les maisons du doyen, des chanoines, avec cour et jardin. Il
y avait aussi un hospice pour les pauvres et une grange pour
les dîmes ( 1189 puis reconstruite au XIII e siècle).
Le cloître avait été fortifié en 1174.
En 1181, Philippe Auguste accorde à Bourges l'autorisation
de construire au delà de l'enceinte gallo-romaine;
Le niveau est différent, de l'ordre
de 6 mètres entre l'intérieur et l'extérieur.
Au début de la construction, l'emplacement
du chevet était pris par une multitude de monuments .
Appuyée sur le mur gallo-romain, il y avait une cathédrale
construite au XI e siècle. Elle devait avoir une longueur
de 45 mètres (120 pour l'actuelle).
A la nef, on ajouta des ailes monumentales.
Vers 1172, on se décide à agrandir la façade
occidentale avec trois portails monumentaux, peut être
en avant d'un narthex ou sous un porche nous dit Branner.
Il y a donc bien une volonté d'agrandissement de la cathédrale
existante.
Le projet de 1195 est bien supérieur,
la nouvelle cathédrale aura 45 mètres de large
et 120 de long. avec 12 travées au deçà
du mur gallo-romain. Mais l'hémicycle, le double déambulatoire
t les chapelles rayonnantes sont en dehors du mur.
LES DEBUTS DE LA CONSTRUCTION
Entre 1191 -93 et 1195, la vieille cathédrale
a sans aucun doute été endommagée par un
incendie, des fouilles de 1952 l'attestent. La décision
de reconstruire un monument plutôt que de la réparer
a été prise peu après. Le don fait à
la fabrique par Henri de Sully est un indice important, mais
on ne sait pas la date "de la pose de la première
pierre".
Pendant toute la construction, l'ancienne église continuera
de servir, il était situé dans la nef de la nouvelle
cathédrale.
Il y aura deux grandes parties dans le
projet : le chevet et la nef. Cela correspond à deux campagnes
aussi bien sur le plan du chantier que de son financement. Chaque
campagne fut à son tour divisée en plusieurs phases.
Le problème posé au premier maître de Bourges
fut de composer avec le site et son encombrement avec de nombreux
édifices sur un espace exigu. La seconde difficulté
était de construire la nouvelle cathédrale sans
perturber l'accès des fidèles et du clergé
soit dans l'ancienne soit dans la nouvelle cathédrale.
(problème d'accès, de confort...)
La vieille nef fut conservée et
littéralement "enveloppée" dans la nouvelle
cathédrale.
Le seul problème dans le début
fut causé par la largeur du transept de l'ancienne cathédrale,
. L'hémicycle et les déambulatoires ainsi que la
première travée située au delà du
rempart vinrent s'adosser au mur oriental du vieux chevet, c'est
alors que cette partie fut démolie.
LE PREMIER MAITRE DE BOURGES
Les grands monuments, de par le monde ne
donnent que rarement la notoriété à leur
créateur, qui a fait l'arc de Triomphe ?, et plus près
de nous, Beaubourg, ou la Grande Arche de la Défense ?
Il faut s'appeler Eiffel pour donner son nom à son oeuvre.
Pour les cathédrales, il en est
de même. On ignore le nom de l'architecte qui a conçu
la cathédrale de Bourges.... merveilleux anonymat.
Alors les spéculations vont bon
train, ce serait Gérard de Cornusse ou encore un certain
Martin. Ces deux noms apparaissent dans une charte de 1224. Branner
élimine ces deux noms, sans doute parce que le maître
de Bourges ne semble pas avoir prolongé son activité
au delà de 1208, date qui marque le début de la
troisième phase du chevet. En 1224, aucun travail important
n'était en cours.
On a cru très longtemps que ce Maître
venait de Paris, qu'il avait travaillé sur le chantier
de Notre Dame. Mais la différence de l'élévation
et la présence d'un transept à Paris font douter
les spécialistes.
Le Maître de Bourges a eu pour successeur
un second Maître qui termina le chevet, dans la troisième
phase.
Il y a eut enfin un troisième maître
de Bourges qui se chargera de la nef et de la façade.
Il ne modifiera pas l'agencement général des volume,
visiblement, il ne le pouvait pas.
1195 - 1214 PREMIERE CAMPAGNE
Tout commence avec la crypte, elle est
située en dehors du rempart gallo-romain. Elle a été
construite en une seule fois.
On trouve quelques différence dans les moulures des piliers,
c'est ainsi que les parties centrales sont antérieures
à l'extérieur.
Une fois la crypte terminée, on passa à la construction
du mur extérieur du déambulatoire. Il n'y avait
pas à ce moment de projet de construire les chapelles
rayonnantes.
Les préparatifs pour la seconde
phase de la construction du chevet ont été très
longs, il fallait en effet détruire les fondations du
chevet de l'ancienne cathédrale (4 à 5 mètres
au dessous du sol).
Les fondations de la cathédrale sont faites de murs de
maçonnerie grossièrement taillés, mais bien
alignées, la largeur au somment est d'environ 3,5 mètres
et la profondeur est supérieure à 8 mètres
(plus au nord).
Au cours de cette seconde phase, on construit
les grandes plies et les piliers intermédiaires de la
partie droite du choeur.
En 1213, le chantier suit bien le programme
d'avancement, le pape est d'ailleurs obligé d'intervenir
pour régler un litige entre les moines cisterciens de
Lorroy et l'archevêque pour exploiter la forêt de
Saint-Palais, laquelle fournissait le bois pour les échafaudages
et la charpente.
Le chevet est terminé en 1214, et
un document précise la réglementation en matière
d'office dans le choeur et le déambulatoire.
En 1215, le gros oeuvre est terminé.
Peut-être est-on en train de mettre en place une partie
des vitreries des verrières hautes.
Un acte de 1218 parle d'un maître verrier engagé
pour construire les vitraux.
Seulement le chantier s'arrête pour
une dizaine d'années. Les hypothèses sont sans
doute un peu technique, il fallait savoir comment réutiliser
les portails roman de l'ancienne église, mais c'est sans
doute le manque d'argent qui arrête le chantier.
C'est Simon de Sully qui est alors à la tête du
diocèse. Il est le neveu d'Henri.
1225 - 1255 : SECONDE CAMPAGNE DE CONSTRUCTION
C'est à partir de 1225 que les travaux
reprennent. Le successeur de Simon de Sully est Philippe Berruyer,
il est lui, le neveu de Saint Guillaume. Il trouve une église
en faillite avec des dettes partout.
Il faudra attendre d'ailleurs 1250 pour que les finances soient
à peut-près saines.
On commence par la nef du côté
sud car il y a moins de dénivellation que du côté
nord.
Les portails latéraux ont été
construits à ce moment, ainsi que les porches.
La vieille nef est détruite et les
fondations gothiques commencées.
Les tours ont été continuées
jusqu'au niveau du grand gâble de la façade.
Il apparaît que la façade
n'était pas terminée, en particulier au niveau
des tours, et aussi sans doute au niveau de la grande rosace.
On ne sait à quoi elle ressemblait avant Jean de Berry.
Le portail sud a été un des
premiers éléments construit au cours de cette seconde
campagne, il devait servir à entrer dans le choeur gothique.
Le projet de la façade à cinq portails a sans
douté été élaboré vers 1228
- 1230.
Pour dater le début de la campagne,
il y a plusieurs indices comme la forme des triforium, organisés
selon le principe de subordination hiérarchique, un arc
unique encadrant deux arcs plus petits, lesquels entourent encore
deux arcs plus petits. Le triforium de Bourges a des tympans
percés d'occuli comme à Amiens ou Salisbury, construits
après 1221.
Les contreforts extérieurs de la
nef sont légèrement plus élevés que
ceux du chevet.
La façade à 5 portails a
été conçue vers 1228 - 1230.
Vers 1250, les travaux semblent se terminer,
les deux tours sont à une belle hauteur, environ à
la hauteur des grandes voûtes.
Il y a alors plusieurs incidents.
En 1259, c'est un incendie qui se déclare, on en connaît
pas trop l'importance, mais il apparaît que les finances
à peine sains en prennent encore un coup!
Il n'y a aucun texte qui donne la date
de finition de la cathédrale, sans doute parce qu'elle
n'a jamais été considérée comme terminée.
Les tympans occidentaux datent de 1255 - 1265, on peut penser
que l'architecture générale de la façade
était terminée un peu avant.
APRES 1260
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Les travaux vont alors se ralentir au niveau
de la façade, par manque d'argent.
Plusieurs faits en plus de chartes viennent montrer ce manque
de finances. C'est ainsi que les fenêtres hautes de la
nef possèdent une série de vitraux en grisaille
au lieu de vitraux polychromes.
De même, la tour nord n'a pas été élevée
au niveau de la tour sud, et restera inachevée pendant
deux siècles.
Vers 1295, on remarque des travaux dus
à Michel, un architecte du chapitre, il travaille sur
les porches latéraux, ainsi que sur les voûtes d'ogives
qui mènent à la crypte.
Plus tard, on découvre des fissures
dans la tour sud. C'est sans doute à cause de mauvaises
fondations. Les étages supérieurs de la cathédrale
commencent à s'écarter et il y a des déchirures
dans les voûtes de la nef. On renonce alors à poursuivre
les travaux d'élévation des deux tours. Et pour
ne pas alourdir encore l'édifice, on ne mit pas de cloches.
La façade ne reçut pas pas son couronnement ni
la rosace.
En 1313, on trouve un financement pour réparer les voûtes
de toute urgence. La tour fut alors étayée par
un énorme pilier butant de 2 étages. C'est le roi
Philippe le Bel qui fit un don de 400 livres pour consolider
l'édifice.
On doit reprendre et remplacer toute une partie de la voûte
du collatéral intérieur, ainsi que des piliers.
Le 13 mai 1324, la consolidation
de la façade doit être terminée puisque la
cathédrale est enfin consacrée, certains affirment
qu'elle ne l'était pas mais que l'on ne pouvait pas faire
mieux !
A la fin du XIV e siècle, la façade
est profondément modifiée avec la suppression du
grand arc qui recoupait la partie centrale et par la construction
du "Grand Housteau" ou rose occidentale à quatre
pointes qui rappelle Tours.
C'est l'architecte du duc de Berry, Guy de Dammartin qui réalise
ce grand Housteau, c'est bien l'achèvement de la façade
principale.
A cette époque fut aussi ajoutée
une toiture transversale et un faux transept ainsi qu'une flèche.
Pour assurer la stabilité, on dota les arcs-boutant de
la première travée de la nef d'une volée
supplémentaire. Mais ces ajouts n'eurent pas de chance,
on les changea plusieurs fois et lui et la flèche furent
supprimés au XVIII e siècle. Mais les arcs boutant
supplémentaires vont rester jusqu'au XIX e siècle.
Au cours du XV e siècle, on transforma
la chapelle de Sainte Solange et Jacques Coeur fit construire
la chapelle symétrique du côté nord du choeur.
On lui doit aussi la sacristie des chanoines.
Différentes chapelles furent ajoutées.
A la
fin du XV e siècle, sans doute en 1493, l'archevêque
Guillaume de Cambrai se lança dans la finition de la tour
nord. Mais les nouvelles maçonneries furent trop pesantes
par rapport aux fondations et le 31 décembre 1506 la tour
s'écroula en abîmant les travées de la nef,
au sud et à l'est.
C'est avec l'argent de Louis XII et des
contribuables que la tour est reconstruite. La tour est reconstruite
à partir de 1508, et le gros oeuvre est achevé
en 1524. et complètement terminée en 1540. C'est
l'architecte de Bourges, Guillaume Pelvoysin qui dirigera les
travaux. Mais il est aussi possible que l'architecte royal Colin
Biard ait participé à l'élaboration des
plans.
Cette tout "neuve", beaucoup plus élevée
que la tour "sourde" puisqu'elle a 65 mètres
de hauteur est conçue dans le style du gothique flamboyant,
et le style "Renaissance" y est effectivement absent.
vitrail (dessin de Bernard CAPO)
Elle prendra par la suite le nom de "tour
de beurre", non pas pour rappeler sa fragilité, mais
parce qu'une partie des fonds recueillis le furent auprès
des fidèles qui versaient une obole en échange
de quoi, ils étaient dispensés du jeûne pendant
le carême. Ils pouvaient manger gras.
Les travaux de reconstruction furent entrepris
presque immédiatement. Ils furent achevés en 1542.
En 1559, les toits ont été
détruits par un grand incendie, ils ont été
immédiatement remplacés.
Les statues des piédroits de
la façade ont été détruites par les
huguenots. C'était en 1562,
au mois de mai, le comte de Montgomery entra par surprise en
ville et pillèrent de nombreuses églises. La cathédrale
fut très menacée, outre les destructions des sculptures,
plusieurs soudards voulurent faire sauter l'édifice en
mettant des tonneaux de poudre au pied de la tour nord, mais
ils étaient passablement éméchés
et la poudre ne prit pas.
Parmi les dégâts subits par
la cathédrale, il faut signaler ceux causés par
le zèle des chanoines du XVIII e siècle. Tout d'abord,
pour moderniser le choeur, des verrières colorées
ont été supprimées et remplacées
par des vitrages blancs.
De même, le jubé qui clôturait le choeur,
édifié dans la même période que les
portails de la façade a été enlevé
en 1757 et dispersé, il a même été
utilisé pour refaire une partie du Choeur vers le maître-autel.
Ce sont les architectes et sculpteurs Slodtz et Vassé
qui ont réalisé cette partie.
Le jubé était orné de bas-reliefs représentant
les scènes de la Passion. Le style est proche de ceux
des plus anciens portails de la façade. Il y avait en
outre une savante polychromie et des incrustations de verres
colorés.
Au dessus du jubé, l'horloge astronomique a été
placée en 1424.
Il a été retrouvé au XIX e siècle,
et fut déposé au Palais Jacques Coeur.
Pendant la révolution, tout l'édifice
fut menacé de destruction. Il y eut peu de véritable
destruction, par contre les objets précieux furent pris.
On songea, comme dans toutes les villes à détruire
l'édifice symbole du clergé, mais ce ne fut pas
fait. Deux raisons, la première, sans aucun doute de coût
de la destruction, et ensuite, où mettre les tonnes et
les tonnes de pierres ?
Au début du XIX e siècle,
on ajouta des balustrades et des pinacles, afin d'imiter la cathédrale
d'Orléans. On peut critiquer ces actions, mais il ne faut
pas oublier que de nombreux travaux étaient devenus indispensables,
ils ont sauvés la cathédrale. Il y a eut sans doute
un peu trop de zèle dans certaines réparations.
La constitution de la Commission des Monuments
Historiques en 1837 mit fin à ce type de modifications.
Depuis cette date, la cathédrale
a été constamment réparée et restaurée,
elle ne sera plus modifiée.
Aujourd'hui, la cathédrale ne diffère
pas beaucoup de ce qu'elle était en 1255. Les différences
tiennent dans le grand Housteau, les chapelles latérales,
les balustrades et les pinacles.
DIVERS
Rien ne prouve qu'une polychromie ait recouvert
primitivement les murs et les piliers de l'édifice. la
peinture qui est observée daterait du XVI e siècle.
Il y aurait peut être eu un badigeon presque du même
ton que la pierre.
La crypte est composée d'une salle
centrale entourée de deux déambulatoires
Adossé au mur du fond de la crypte, une "Mise au
Tombeau" est placé sous un portique Renaissance,
fut donné au chapitre par le chanoine Pierre Dubreuil
en 1543, c'est un groupe assez conventionnel composé de
10 personnages en ronde bosse entourant le corps du Christ supplicié.
Dans le Chapelle de Jacques Coeur, les
statues orantes de trois membres de la famille Laubespine sont
les reste de leur tombeau, ils furent mis là par Philippe
de Buyster.
L'effigie du maréchal de Montigny
est de Michel Bourdin, elle devait se dresser vers 1619 sur un
mausolée classique qui ne sera jamais réalisé.
La double volée d'arc boutant
extérieurs est le dédoublement de la volée
simple du groupe parisien. Elle apparaît au même
moment dans la cathédrale de Chartres.
Le problème ne pouvait se poser que dans une église
à doubles collatéraux.
Bourges et Chartres, sur ce point font oeuvre de nouveauté.
L'emploi de l'élévation à trois étages
et du mur épais associé à l'arc-boutant.
La façade devait préparer
le spectateur à la contemplation de l'intérieur.
Le beffroi de la tour sud était
certainement prévu pour supporter une flèche octogonale,
avec des faces alternativement grande et petites.
La cathédrale de Bourges est essentiellement
une spéculation sur des volumes intérieurs à
une échelle colossale.
On sait que le chevet est achevé
vers 1214, et la nef entreprise en 1225. Or les architectes formés
à Bourges au cours de la première campagne des
travaux ont travaillé à Burgos après les
années 1221, et sans doute aussi au Mans.
Le calorifère de la cathédrale
est une installation qui date de la fin du XIX e siècle.
Il s'agissait à cette époque de chauffer l'édifice,
et deux architectes très connus à Bourges se sont
lancés dans le sujet. Paul Boeswillwald, qui était
l'architecte des monuments historiques et Emile Tarlier qui était
alors l'architecte du diocèse.
Ce calorifère va fonctionner à
partir de 1894, il a été nécessaire de faire
des travaux considérables et en particulier, comme l'écrit
Benoît Morin, "une grande excavation de 12 mètres
de long, 8 de large, et 5 de profond". Et c'est ainsi que
les terrassiers vont trouver de très nombreuses tombes
d'ecclésiastiques, dont une soixantaine de chanoines.
Ce saccage de l'époque est parfaitement
condamnable.
Les travaux commencent le 26 juin 1894,
et il est inauguré quelques mois plus tard, le 2 décembre
1894, ayant coûté près de 70 000 francs.
C'est un chauffage que l'on peut encore
voir aujourd'hui, il comprend en sous-sol, vers la crypte pas
moins de 11 foyers qui utilisent le charbon et au dessus des
"tuyaux" qui réchauffe l'air, lequel passe alors
sous la cathédrale à la hauteur de l'autel.
On connaît les noms des 2 ingénieurs
qui ont réalisé ce calorimètre, il s'agit
de Albert Robin et de Fernand Delsaitre.
Les visiteurs aujourd'hui ne peuvent voir
que ... les rails qui traversent le couloir de descente vers
la crypte, car le charbon, il fallait 1 tonne par jour, et l'on
utilisait des petits wagons. D'ailleurs lors de la guerre de
14/18, le charbon était devenu très cher et chacun
se posait des questions sur l'utilité de ce calorifère.
D'autant plus que la cathédrale
n'est pas chauffable et que tout chauffage n'augmente la température
que de quelques degrés, certains affirment qu'il pouvait
y avoir 8 à 10 degrés à l'intérieur
!
Ce n'est qu'à partir de 1950 qu'il
sera mis hors fonctionnement. Il s'agissait alors de remplacer
ce calorifère par un autre système plus performant...
qui ne verra jamais le jour. Il faut ajouter que le chargement
du charbon était bruyant et surtout il y avait une odeur
pas très agréable qui pénétrait dans
la cathédrale.
Le pélican de Bourges surmonte
la tour Nord, il est situé sur un petit édifice
lequel comprend la cloche qui date de 1372, offerte par le duc
Jean de Berry.
Bourges est assez curieuse sur ce plan
puisque le sommet des Eglises comprend généralement
un coq. Ici c'est un pélican qui est un symbole universelle
et aussi catholique, il représente l'Eucharistie. C'est
un bel objet en bronze, qui a sans doute été réalisé
vers 1530 par Guillaume de Cambrai. Il a dû être
mis sur le clocher qui était au milieu de la nef, mais
transporté sans doute sur la tour Nord.
En 1995, le pélican, en mauvais
état sera mis à l'intérieur de la cathédrale,
et remplacé par une copie.
Les grilles de
la cathédrale sont remarquables, elles sont située
autour du choeur, elles datent au milieu du XIX e siècle.C'est
Morin un serrurier de Bourges qui les a réalisées
vers 1856., ce sont surtout les grilles basses des chapelles.
Par contre c'est un serrurier de Paris Boulangers Pierre qui
fera celles du choeur vers 1850.
Enfin, et c'est une curiosité, c'est
la grille réalisée à Mehun-sur-Yèvre
par les Ets Larchevêque qui réaliser en 1865 les
grilles d'entrée du choeur. Mais elles ont été
enlevées en 1950, une partie est toujours visible dans
la chapelle Fradet, quant à l'autre, c'est une curiosité,
elles sont montées rue Joyeuse, au Foyer Saint-François,
ce qui pose des questions aux nombreux touristes qui se demandent
ce que font ces grilles en un tel lieu !
Notons l'aigle du choeur qui est un lutrin
en ferronnerie d'art, il vient d'un artiste de Nevers et date
de 1828.
Les travaux récents :
Au début des années 2000,
c'est un travail de réfection et réhabilitation
des 5 portails, cela va durer 5 ans, 1 an par portail, le résultat
est remarquable.
C'est en 2009 que sont décidés
les travaux sur la cathédrale, avec la réfection
totale de la toiture.
Une opération qui commence en janvier
2010 et qui va durer en 3 tranches près de 5 ans. L'ampleur
des travaux va nécéssiter un échafaudage
parapluie qui va se déplacer à 3 reprises.
En conclusion :
Dans un numéro
spécial du POINT, du jeudi 30 mars 2006, sur les Cathédrales,
on parle pendant 34 pages, de Reims, Beauvais, Amiens, Nevers,
ce qui est très bien. Et on cherche un mot sur Bourges
: RIEN.
De son côté
TF1 qui a repris les infos.... et ce sont des reportages sur
plusieurs cathédrale mais rien sur Bourges.
Une simple phrase à
la fin de l'interview du grand spécialiste Alain Erlande-Brandenburg qui affirme à l'issue d'une
très intéressante analyse des cathédrales
gothiques, que de cette cinquantaine de cathédrale de
France,
"celle
que je préfère, c'est pour moi, Bourges. C'est
la plus extraordinaire, la plus prenante, la plus bouleversante,
la plus lyrique. Et la plus marginalisée. C'est celle
où il y a le moins de pierre, avec ses cinq nefs comme
Saint Pierre de Rome, et ses effets intérieurs incroyables".