Les cités-jardin de Bourges - Encyclopédie -Roland Narboux

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LES CITES JARDINS DE BOURGES
Par Roland NARBOUX

Un domaine du patrimoine urbain de Bourges avec la cité-jardin de l'Aéroport qui date des années 1930.

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Version 2009

 

Au cours des journées du Patrimoine de septembre 2000, beaucoup ont découvert l'architecture urbaine du XX ième siècle, thème de cette édition, et dans les réalisations qui furent montrées à Bourges figurait "les cités-jardins de l'Aéroport" : un ensemble de constructions datant des années 1930.
Une cité-jardins, à l'origine est un concept du XIX ième siècle, issu des idées de Fourier et de Godin sur les phalanstères et autres familistères. Cette idée de logements sociaux est théorisée par un anglais Howard : c'est la cité-jardins, elle comprend un logement et un jardinet attenant. En France un homme concrétise à une grande échelle ces notions, c'est Henri Sellier un berruyer, il va oeuvrer avec son ami Henri Laudier maire de Bourges de 1919 à 1943.

Le manque de logement au XX ième siècle

Une des oeuvres essentielles de la municipalité d'Henri Laudier se manifeste dans le domaine du logement. La crise du logement à Bourges depuis la fin de la guerre de 1914 est des plus aiguë. Les causes sont diverses, depuis cette période, pas ou peu de logements ont été construits et comme le rappelle Laudier le 23 octobre 1920, " beaucoup de nos concitoyens qui s'étaient gênés au possible pendant la guerre, pour faire place aux passagers, ont tenu à reprendre leurs aises dès la guerre terminée".

Pour lutter contre ce manque de logements, Henri Laudier envisage la création d'un Office public d'Habitations à Bon Marché. Il s'agit de l'ancêtre de nos H.L.M. ; on les appellera les H.B.M., Habitations à Bon Marché. C'est un établissement public chargé de l'aménagement et de la création de maisons, mais aussi de l'aménagement extérieur, nous dirions d'environnement, avec, deux exemples, les cités-jardins et les jardins ouvriers.

Un décret du Président de la République, Alexandre Millerand est signé à Fez le 12 avril 1922 il stipule dans ses articles : " Il est créé un Office public d'habitations à bon marché pour la ville de Bourges (Cher)." Et pour plus de sécurité, Laudier s'était assuré les conseil d'un berruyer, spécialiste de l'urbanisme et célèbre à cette époque, Henri Sellier.

Henri Sellier, le ministre berrichon

Henri Sellier naît à Bourges le 22 décembre 1883 ; son père est ouvrier aux Etablissements Militaires. Il s'en va très vite à Paris pour suivre des études de haut niveau. Il réussit parfaitement à H.E.C. avant de faire son Droit. Il est boursier, car il n'y a pas beaucoup d'argent dans la famille. En 1898, il s'inscrit au Parti Socialiste Révolutionnaire d'Edouard Vaillant, un autre Berrichon.
Son circuit professionnel commence dans la banque où il devient employé, avant d'entrer au Ministère du Travail comme rédacteur. La politique au début du siècle le passionne.
L'année où Laudier prend la mairie de Bourges, Sellier, lui, s'empare de celle de Suresnes. Quelques années plus tard, il devient Président du Conseil Général, puis Sénateur de la Seine.

C'est dans le domaine de l'urbanisme qu'Henri Sellier montre toute sa compétence.

Cité jardin de l'aéroport

Dès 1916, il est administrateur de l'OPHBM de la Seine et il constitue autour de lui une équipe comprenant des architectes et autres hommes de l'Art. Il acquiert des terrains pour construire ce qu'il appelle les cités-jardins. En 1920, il est secrétaire de l'Union Nationale des organismes d'habitations à loyers modérés. Sa thèse principale date de 1921 ; il publie en effet "la crise du logement et l'intervention publique en matière d'habitat populaire", puis devient le fondateur de l'Association Française pour l'urbanisme.

Son oeuvre restera dans l'histoire, avec la création des cités-jardins, qui seront des pôles d'attraction résidentiels implantés en fonction du marché du travail. Les cités-jardins constituent des ensembles urbains dans lesquels on réunit des groupes d'individus avec leur famille afin de créer de toutes pièces une cité. Il s'agit de régénérer le tissu urbain. Henri Sellier écrit :


" L'urbanisme social se doit d'organiser un meilleur aménagement de l'humanité, vers un niveau de lumière, de joie et de santé, un meilleur rendement économique car il y a urgence à défendre la race dans tous les domaines contre la certitude de dégénérescence et de destruction que les lamentables statistiques de la natalité, maladie, mort, laissent apparaître : 18 % de la perte du revenu national est due à la maladie".

Dans l'entre-deux guerres, Sellier sera à l'origine de onze cités-jardins créées autour de Paris.
Cet homme sera un militant de l'urbanisme "à visage humain" et à Bourges, il viendra éclairer de ses conseils les socialistes locaux, dont Laudier.

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L'Office d'Habitations à Bon Marché de Bourges

La gestion de cet Office est assurée par un Conseil d'Administration de 18 membres et d'un bureau de 6 membres. Le conseil municipal délibère et vote la demande de cette création.
Dans les semaines suivantes, Laudier est élu Président. Dès la première séance, le but de l'Office est défini : "c'est d'acquérir et de construire des habitations conformes aux règles d'hygiène et au confort moderne, d'en rester propriétaire et d'en assurer la gérance et la jouissance au mieux des intérêts de la collectivité".
Dès la fin de l'année 1922, les premiers terrains sont acquis par l'O.P. d'HBM ; c'est encore modeste, avec 423 mètres carrés à l'angle de la route de La Charité et de celle de Saint-Michel-de-Volangis ; sur cette surface, 8 à 10 logements pourraient être construits.

Les H.B.M. seront édifiés à Bourges avec les maisons du boulevard Auger, côté des numéros impairs, puis celles du côté pair, enfin la cité de l'Aéroport, et plus tard encore, les constructions du Beugnon et du Moulon.

Au cours d'une séance du Conseil d'Administration en 1923, Henri Laudier présente Henri Sellier, alors secrétaire général de la Fédération des Offices publics d'H.B.M., qui est venu à Bourges "prodiguer ses conseils éclairés et aider au bon fonctionnement de l'Office local", comme le dit le Maire dans un propos d'accueil. En effet, Henri Sellier explique la méthode à suivre pour réunir les moyens financiers ainsi que des éléments précis nécessaires à la constitution des dossiers.

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Les Cités Jardin de l'Aéroport

L'idée de Laudier, c'est de construire des logements "à bon marché", à la périphérie de la ville, pour disposer de terrains peu coûteux et de grande surface. Le quartier sud est intéressant suite à la construction de l'usine d'aviation Hanriot à partir de 1928 et la ville décide d'édifier des logements pour les salariés, car les effectifs des employés ne cesse de croître, de quelques dizaines, ils sont 2000 en 1936 et les moyens de transports collectifs ou individuels sont faibles.
En face de l'Usine, sur un vaste terrain disponible, l'architecte Payet-Dortail propose de construire 262 logements selon une proportion de 135 logements individuels et 127 en immeuble collectif. Mais l'étude des coûts et la nécessaire construction d'un important groupe scolaire modifient cette proportion…. Il est plus économique de construire du collectif et ce sont finalement 335 logements qui sont proposés dont le tiers seulement (108) en individuels, et les travaux commencent.
De 1933 à 1940 se dressent de nombreuses maisons de pierre, dans un espace de verdure et des îlots d'habitations trapézoïdales. On découvre une grande variété de volumes construits le long des rues aux noms de nos aviateurs prestigieux comme Louis Blériot, Nungesser et Coli ou encore Maryse Bastié.

L'architecte utilise l'expérience de la banlieue parisienne, de création récente. Ce sont des pavillons individuels, parfois jumelés, parfois en bande, avec des formes cubiques, très fonctionnelles et une toiture plate peu courante en Berry, ils sont de plein pied et chacun dispose d'une cour devant la maison et d'un potager sur l'arrière, avec de larges surfaces de verdures communes à tous. Le constructeur est la société Leseing, très connue à l'époque.
Il existe aussi des logements dits "améliorés" qui comportent "un appareil à douche" et une surface habitable supérieure de 12 mètres carrés.

Ce qui est caractéristique dans ces cité-jardin, c'est l'importance des espaces verts. On peut ainsi trouver de petites places arborées avec du gazon et quelques plantations. Mais les maisons individuelles possèdent aussi le potager, si cher aux berrichons. Les étendoirs sont collectifs et les clôtures en béton sont uniformisées et si aujourd'hui la voiture automobile stationne sur l'ensemble des rues, on imagine la tranquillité du quartier dans les années 30 !
Les immeubles collectifs sont plus imposants, mais ils ne comportent que quelques étages, ce qui les rend à la fois plus humains et habitables.

Jardins précurseurs

L'ensemble de ces constructions de l'Aéroport constitue lorsqu'il est créé, le plus bel exemple de cité-jardin construite en province. Henri Sellier en 1936 vient visiter cette œuvre qui est un peu la sienne , et lors de la visite présidentielle de 1938, Albert Lebrun se fera présenter la cité et entrera dans un logement habité par une famille d'ouvriers.
Par la suite, la guerre vide les habitants de ces lieux réquisitionnés par les troupes allemandes, et le quartier subit quelques bombardements. Mais après guerre, la cité de l'Aéroport reprend sa vie avec la construction d'un groupe scolaire place Mesmin.
Les logements sont parmi les plus demandés de la ville, alors que progressivement, par manque d'entretien de la part de l'Office de HLM, certains "vieilliront mal", alors que d'autres, réhabilités, resteront de petites merveilles.
Sur le plan de la conception de l'urbanisme de la ville, les cités-jardins restent un magnifique exemple de logements sociaux, à l'opposé des constructions des barres et immeubles des années 60 et 70.

La cité jardin en 2007 :

En 2005, dans le cadre du renouvellement urbain, la question va se poser de savoir comment faire évoluer cette cité. Pour les "économistes", et ce n'est pas une critique, ils tiennent les cordons de la bourse, et donc l'argent des contribuables, il faut raser la cité et reconstruire.

Pour d'autres, il faut tout conserver en l'état, car c'est un exemple presque unique de ce qui se faisait dans les années 1930.

D'autres enfin, pensaient pouvoir réhabiliter la cité avec des travaux, mais en modifiant profondément les logements et l'environnement.

Finalement par le plan Borloo du Renouvellement Urbain, et le combat de certains d'entre nous, il fut décidé de conserver la cité telle quelle était en réhabilitant chaque logement. le coût sera considérable mais l'aspect "patrimonial" a gagné.

99 logements seront entièrement réhabilités, sachant qu'une dizaine ont été vendus dans les années passées.

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