Accidents et explosions
pyrotechiques à Bourges
Les grandes explosions en France dans le
domaine de la pyrotechnie ne sont pas très nombreuses,
mais sont significatives, on notera :
- A la poudrerie de Grenelle à Paris
avec 1000 victimes le 31 août 1794.
- Toujours à Paris, rue de Tolbiac,
dans une fabrication de grenades, 50 morts le 20 octobre 1915.
On remarquera que le propriétaire, Louis Billant viendra
ensuite à Bourges au Prado afin de poursuivre ses activités
puis à La Chapelle Saint 6ursin en 1930.
- Près du Havre, une usine est détruite
faisant 100 morts et 1500 blessés le 11 décembre
1915.
- A La Pallice, l'usine Vandier-Despret
est détruite, faisant 177 morts le 1 er mai 1916.
- Près de Tours, la poudrerie du
Ripault explose avec 77 morts el 18 octobre 1943.
Enfin, il faudrait signaler l'usine AZF
de Toulouse avec 31 morts et 2500 blessés, le 21 septembre
2001, l'enquête n'est sans doute pas terminée.
La pyrotechnie à Bourges
Tout commence avec l'installation le 30
décembre 1871 à Bourges de la Commission d'Expérimentation
de Bourges qui deviendra l'ETBS, après bien des difficultés
au niveau du ministère de la Guerre.
En 1886, au mois de décembre , le
ministre de la Guerre qui est le célèbre général
Boulanger vient à Bourges afin d'assister à des
expérimentations au Polygone de tir d'obus à la
mélinite, qui avaient été inventés
par les capitaines Locard et Hirondart.
A cette occasion, des buttes de tir en béton avaient été
édifiées pour la circonstance.
Le Monument du souvenir
C'est au cimetière des Capucins, à
droite en entrant, le long de l'allée, après le
bureau du gardien, se trouve une haute pyramide avec sur chaque
côté, le nom des morts à la suite accidentelle
de diverses explosions à Bourges, en particulier aux Etablissements
militaires dont l'ECP, dite Ecole Centrale de Pyrotechnie.
Ce monument avait été érigé
par la Ville de Bourges en 1890 en hommage aux ouvriers ou militaires
tués à la suite de ces différentes explosions.
Avec, pour 1907, un seul nom sur la tombe.
Les explosions à
Bourges
On trouve ainsi dans cette ville qui manie
depuis le XIX ° siècle la poudre et autres explosifs,
un certain nombre d'explorions aux conséquences mortelles
:
- L'explosion du 10 octobre 1890
Elle fera 4 victimes.
C'était à l'Ecole centrale de pyrotechnie, dans
l'enceinte des élèves à l'emplacement de
la salle des fourneaux pendant l'amorçage de 29 obus,
de 270 de trois calibres, chargés en crésylite.
Mort de :
Thirion, Garde Principal d'Artillerie.
Mauguillon, maître artificier
Didier V. maître atificier
Aubèges M.A., 2° artificier de la 1 ° compagnie
d'artificiers.
Dans un premier temps, Havas affirme qu'il
y a eu au moins 10 morts et une trentaine de blessés.
Les informations sont parcellaires et mêmes erronées,
la seule chose que l'on sait c'est la présence de 45 sous-officiers
qui devaient être dans une salle pour une démonstration
de vissage par M Thirion, Mais comme il y avait un cours de topographie
qui fut avancé à la même heure, car l'officier
faisant ce cours devait s'absenter le soir, il y aura peu de
monde dans cet atelier..
L'atelier a été entièrement
rasé mais les consignes après l'accident sont draconiennes,
l'entrée de l'usine est refusée à M. Brunet,
le premier adjoint de la ville de Bourges.
Le maire de Bourges M. Lamy protestera
auprès du directeur de l'Ecole de Pyrotechnie car aucun
représentant de la municipalité n'a été
autorisé à entrer et que la liste des blessés
n'a pas été communiquée.
Autre point, les restes de 4 malheureux
militaires impossibles à reconna^tre seront mis dans 4
cercueils.
M Thirion était un militaire averti,
avec 35 ans d'ancienneté.
Les obsèques se dérouleront
devant 10 000 personnes et les autorités civiles et militaires.
- Explosion du 7 mars 1898
A lire sur la pyramide du cimetière
des Capucins de Bourges :
Marty Jean François sous-chef d'artillerie au 19 °
Régiment d'Artillerie
Roger Léon sous-chef d'artillerie au 6 ° Bataillon
d'artillerie à pied de Nancy, tué dans le service
le 7 mars 1898, il a succombé à ses blessures le
lendemain à l'hôpital Baudens.
Il n'y a pas de date sur le monument, mais on la retrouve sur
la plaque " A la Mémoire de
"
Cette explosion s'est déroulée
dans l'enceinte des élèves , à l'emplacement
de la salle des fourneaux en triturant des matières pour
la préparation d'une poudre spéciale à combustion
lente pour la fabrication des mèches lentes à étoupilles,
qui devait servir à faire éclater les obus.
On ne s'explique pas les raisons de l'explosion,
" comment la poudre en préparation a pu produire
des dégâts aussi considérables, car elle
ne devait comporter qu'une dose minime de salpêtre.
Les obsèques selon le Journal du Cher se sont déroulé
devant une foule considérable à l'hôpital
Militaire Baudens.,avec un cortège qui s'en ira vers la
gare, traversant toute la ville de Bourges.
il est dit aussi " que les manifestations comme celle dont
notre ville a été témoin, prouvent combien
notre armée est sympathique, combien elle est aimée
".
M. Roger tournait la manivelle et M. Marty
à l'aide d'un petit marteau, frappait légèrement
le barillet à l'extérieur pour empêcher l'adhérence
de la matière contre les parois.
Il y aura quelques blessés, comme
Hunel du 8° régiment d'artillerie.
- L'explosion du 18 mars 1899,
Il y aura 2 morts et deux autres après
blessures.
Cela se passe à l'Ecole centrale
de Pyrotechnie avec la mort de Joseph Decroix et Alphonse Moreau,
alors que Claude Lacarin et Louis-Adolphe Miniot vont succomber
à leurs blessures quelque temps plus tard à l'hôpital
militaire.
Il y a eu, semble-t-il une déflagration
des obus qui va durer une minute et demi, ce qui est considérable.
Cela s'est passé au polygone.
Ce sont 5 obus qui sont partis simultanément, puis 12
à 20 obus ont alors sauté, et enfin selon la presse
locale, 40 à 60 auraient pris feu, un obus renfermant
150 balles.
Il faut ajouter la combustion de la poudre.
L'atelier est détruit, criblé
par la mitraille, puis par l'incendie.
L'inhumation se fera au cimetière
des Capucins, les trois tués étant de la paroisse
de Saint-Pierre-le-Guillard.
- L'explosion du 2 novembre 1907.
C'est un des accidents parmi les plus mortels
à Bourges, avec 9 morts.
Ce 2 novembre 1907, un chargement de 20 obus à la mélinite
(19 sans doute à la crysélite) est transporté
sur la route de Crosses, lorsqu'à 12 h 10, à la
hauteur du " point 6000 " du polygone une explosion
retentit, le convoi a explosé et 7 personnes seront tuées
et 3 grièvement blessées.
Selon d'autres chiffres macabres, ce sont 8 victimes dont l'artificier
Edmond Abel Brousse il était 2 ième artificier
de la 1 ère Compagnie.et deux autres seront grièvement
blessés.
Le corps du maréchal des logis sera retrouvé à
20 mètres, accroché en lambeaux aux branches d'un
arbre.
L'enquête démontrera que les obus avaient été
transportés pour le point 6000, pour des essais à
la commission d'expérience.
Les obus, étaient restés amorcés, et les
soldats sont montés pour le trajet sur le véhicule,
ce qui est interdit.
Il s'agit d'une désobéissance avis à vis
du règlement : les soldats étaient juchés
sur le véhicule, contrairement au règlement.
La liste des morts est la suivante :
Gouin Louis, ouvrier civil.
Puis des militaires :
Monniotte Amédée, maréchal des Logis, 22
ans
Brousse Edmond Abel, 19 ans
Richaud Henri, 22 ans
Blavot Louis 21 ans
Plantié Albert 22 ans
Martin Félix 22 ans
Gobain Eugène 22 ans
Les blessés furent Chaussé,
19 ans et Foltier, 21 ans.
Les obsèques seront grandioses, il y aura 20 000 Berruyers
qui seront présents le long du parcourt funèbre,
avec la présence du ministre de la Guerre, le général
Picquart.
- L'orage du 2 juillet 1914
C'est le jeudi 2 juillet qu'un violent
orage s'abat sur le polygone de tir où 12 militaires avaient
dressé leur tente. Ils étaient du 85 ° RI de
Cosne, l'un d'eux fut foudroyé et les onze autres sont
blessés par brûlures.
- L'explosion du 18 septembre 1915
Nous sommes en plein conflit mondial, et
c'est accident dont on ne sait pas grand chose. Cela se passe
à l'Ecole de Pyrotechnie, et Pierre Thomas est atteint
par une explosion, il meurt des suites de ses blessures.
L'explosion du 20 août 1946
Les carrières du Château,
avenue de Dun furent une champignonnière avant de devenir
un dépôt de munitions lors de la dernière
guerre de 39 / 45.
Les Allemands avaient entreposé pendant la guerre de 1939
/ 40 , de nombreuses munitions qui étaient utilisées
par leurs escadrilles de bombardement. Une des tâches des
autorités locales après la Libération fut
de procéder à leur neutralisation. Ce n'était
pas simple d'autant plus que les Allemands, au moment de leur
départ procédèrent à plusieurs destructions.
Au cours de l'opération de désamorçage des
bombes, dans une des nombreuses carrières situées
avenue de Dun, va se produire un accident terrible.
Ils étaient 10 employés des Etablissements Gaschet,
lesquels avaient obtenu le marché de désamorçage
de 3000 bombes incendiaires et explosives, de la dernière
guerre, stockées par les Allemands et les Français.
Le mardi 20 août 1946, route de Dun, dans une ancienne
champignonnière, au lieu-dit "Les Justices",
ces employés devaient désamorcer les bombes et
récupérer le métal. Depuis le début
de ce travail, 2000 bombes avaient déjà été
désamorcées. Les artificiers, dont un seul était
un professionnel, devaient couper les fils des fusées
électriques, prélever la poudre noire, puis la
noyer dans un trou d'eau. Ce n'était pas un travail compliqué,
et les risques ne semblaient pas énormes, même si,
le matin même, un sergent aviateur leur avait dit d'être
prudents.
C'était l'après-midi, vers 16 h 50, une formidable
explosion se fit entendre, un nuage de fumée de 500 mètres
de hauteur était visible à des kilomètres
à la ronde. A l'arrivée des pompiers, rapidement
sur les lieux, un cratère de 100 mètres de long,
35 mètres de large et profond de 16 mètres dégageait
une poussière noirâtre. A un demi-kilomètre
de là, des graviers gris et noirs jonchaient le sol.
Avec les pompiers, c'est l'arrivée du Préfet, Maxime
Roux, puis du Maire de Bourges, Charles Cochet. On a placé
un cordon de policiers pour empêcher les curieux de s'approcher,
et on a cherché à retrouver les 10 malheureux.
A proximité, des femmes pleurent, les dix hommes étaient
de Bourges, ils avaient été embauchés pour
ce travail, et dans ces années de fort chômage,
la qualification par rapport au travail n'était pas le
point le plus important.
Pendant toute la journée du lendemain, les pompiers, conduits
par le Commandant Hemery, vont explorer les galeries. Ils parcourent
400 mètres, mais les éboulis sont nombreux et surtout,
des explosions se font entendre. Il est décidé
de suspendre les recherches tant qu'il y aura des explosions
et des incendies, il reste encore au moins 50 tonnes de bombes
dans les galeries. Par contre, les sauveteurs ne signalent aucun
cri : pour tous, il n'y aura pas de survivant.
Les jours passent, toutes les tentatives de retrouver les corps
ont échoué. Les curieux viennent toujours sur les
lieux, et l'on recherche les causes de l'accident. Prévalent
deux théories, la première, c'est la panne d'électricité,
qui se serait produite en fin d'après midi, et l'un des
"artificiers" aurait allumé son briquet pour
voir clair, faisant exploser la poudre présente. La seconde
hypothèse, c'est l'erreur humaine de manipulation.
Devant les risques encourus par les sauveteurs, les autorités
vont utiliser des prisonniers allemands qui vont petit à
petit dégager les galeries. On les voit en photo, faire
la chaîne avec des seaux remplis de terre et de gravats.
Le premier cadavre ne sera dégagé que le mardi
28 août, soit 8 jours après l'explosion meurtrière.
Progressivement, au fil des jours, des cadavres sont découverts.
Le 2 septembre, on entend toujours des explosions et à
la date du 11 septembre, on n'a retrouvé les corps que
de 4 artificiers sur les 10 ensevelis.
Le bilan de cette explosion de Bourges sera de 10 morts parmi
les ouvriers français.
Aujourd'hui le lieu est bien entouré et grillagé,
et des pancartes en interdisent l'accès. Le trou est encore
bien visible, montrant l'importance de l'explosion. Il est question
aujourd'hui de combler l'ensemble, avec de la terre et du béton,
car il y a encore sous les gravas, 50 ans après, des obus
ou autres instruments explosifs.
Les carrières ne sont pas un lieu de villégiature.