L'urbanisme a Bourges - Roland Narboux - encyclopedie

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L'URBANISME A BOURGES AU XX e SIECLE
Par Roland NARBOUX

L'urbanisme à Bourges, avec en fin de l'article, le nouveau PLU, Plan local d'Urbanisme de Bourges.

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Version 2009

 

l'urbanisme a BourgesL'urbanisme à Bourges au XX e siècle est l'oeuvre du maire Henri Laudier qui va totalement transformer la cité dès la fin de la première guerre mondiale. Le problème essentiel étant le besoin de loger les habitants qui arrivent des campagnes pour travailler dans les "Etablissements militaires".

Plus tard avec Louis Mallet, le système de construction se poursuit, mais il faut attendre les années 1960 avec Raymond Boisdé qui est à la fois dans la réalisation des quartiers de la Chancellerie et des Gibjoncs, et ensuite dans le quartier du Val d'Auron.

HENRI SELLIER, LE MINISTRE BERRICHON

Henri Sellier naît à Bourges le 22 décembre 1883 ; son père est ouvrier aux Etablissements Militaires.
Il s'en va très vite à Paris pour suivre des études de haut niveau. Il réussit parfaitement à H.E.C. avant de faire son Droit. Il est boursier, car il n'y a pas beaucoup d'argent dans la famille. En 1898, il s'inscrit au Parti Socialiste Révolutionnaire d'Edouard Vaillant, un autre Berrichon.
Son circuit professionnel commence dans la banque où il devient employé, avant d'entrer au Ministère du Travail comme rédacteur. La politique au début du siècle le passionne. Il n'oublie pas son département du Cher et oeuvre en 1905 pour la réunification des familles socialistes alors divisées.
L'année où Laudier prend la mairie de Bourges, Sellier, lui, s'empare de celle de Suresnes. En 1920, il choisit le camp des "reconstructeurs" et suit la majorité S.F.I.C. après le Congrès de Tours ; il devient donc Communiste. Ce n'est qu'en août 1924 qu'il revient à la "Maison S.F.I.O." ; quelques années plus tard, il devient Président du Conseil Général, puis Sénateur de la Seine.

C'est dans le domaine de l'urbanisme qu'Henri Sellier montre toute sa compétence. Dès 1916, il est administrateur de l'OPHBM de la Seine et il constitue autour de lui une équipe comprenant des architectes et autres hommes de l'Art. Il acquiert des terrains pour construire plus tard des cités-jardins. Henri Sellier anime alors plusieurs Offices et autres organismes d'habitations. En 1920, il est secrétaire de l'Union Nationale des organismes d'habitations à loyers modérés. Sa thèse principale date de 1921 ; il publie en effet "la crise du logement et l'intervention publique en matière d'habitat populaire", puis devient le fondateur de l'Association Française pour l'urbanisme.

Son oeuvre restera dans l'histoire celle de la création des cités-jardins, qui seront des pôles d'attraction résidentiels implantés en fonction du marché du travail. Les cités-jardins constituent des ensembles urbains dans lesquels on réunit des groupes d'individus avec leur famille afin de créér de toutes pièces une cité. Il s'agit de régénérer le tissu urbain. Henri Sellier écrira :

" L'urbanisme social se doit d'organiser un meilleur aménagement de l'humanité, vers un niveau de lumière, de joie et de santé, un meilleur rendement économique car il y a urgence à défendre la race dans tous les domaines contre la certitude de dégénérescence et de destruction que les lamentables statistiques de la natalité, maladie, mort, laissent apparaître : 18 % de la perte du revenu national est due à la maladie".

Dans son action, Sellier cherchera aussi à "redresser les mentalités". Il va appliquer des règles sociales et des grilles de sélection "des candidats" au logement. Le service social de l'OPHBM se chargera de mesurer par exemple le taux de rotation des habitants d'une cité pour évaluer la stabilité et rectifier les écarts avec les normes. Dans l'entre-deux guerres, Sellier sera à l'origine de onze cités-jardins créées autour de Paris.

Cet homme sera un militant de l'urbanisme "à visage humain" et à Bourges, il viendra éclairer de ses conseils les socialistes locaux, dont Laudier.

Sur le plan politique, Henri Sellier militera le reste de sa vie à la S.F.I.O., et il sera ministre de la Santé de 1934 à 1937 ; il ne prendra pas part au vote pour la déchéance des députés communistes ni au vote donnant les pleins pouvoirs à Pétain. Il meurt le 23 novembre 1943, alors que deux ans auparavant, le gouvernement Pétain l'avait révoqué de son poste de maire, la ville de Bourges a donné son nom à une des rues du centre-ville.

L'OFFICE D'HABITATIONS A BON MARCHE

Une des oeuvres essentielles de la municipalité Laudier se concrétisera dans le domaine du logement. La crise du logement à Bourges depuis la fin de la guerre est des plus aiguë. Les causes sont diverses. C'est d'abord le fait que depuis une dizaine d'années, pas ou peu de logements ont été construits ; ensuite, de nombreuses personnes ayant quitté Bourges pour retourner dans leur ville d'origine - situées dans le Nord ou l'Est - conservent à Bourges le logement qu'elles ont occupé pendant le conflit. Enfin, comme le rappelle Laudier le 23 octobre 1920, " beaucoup de nos concitoyens qui s'étaient gênés au possible pendant la guerre, pour faire place aux passagers, ont tenu à reprendre leurs aises dès la guerre terminée".

Pour lutter contre ce manque de logements, Henri Laudier envisage la création d'un Office public d'Habitations à Bon Marché. Il s'agit de l'ancêtre de nos H.L.M. ; on les appellera les H.B.M., Habitations à Bon Marché. C'est un établissement public placé par exemple, auprès d'une commune, et chargé de l'aménagement et de la création de maisons, mais aussi de l'aménagement extérieur, nous dirions d'environnement, avec, par exemple, les cités-jardins et jardins ouvriers.

Le décret du Président de la République, Alexandre Millerand, signé à Fez le 12 avril 1922 stipule dans ses articles :
" Il est créé un Office public d'habitations à bon marché pour la ville de Bourges (Cher).Sont approuvées les délibérations du conseil municipal de Bourges."

La gestion est assurée par un Conseil d'Administration de 18 membres et d'un bureau de 6 membres. Le conseil municipal délibère et vote la demande de cette création, et, en cas de réponse positive, il vote une première dotation en numéraire de 10 000 francs, ainsi qu'une subvention annuelle de 1000 francs.
L'acceptation de cet Office est confirmé dans les semaines suivantes, et le Conseil d'Administration se réunit le 22 septembre 1922 à 16 heures pour la première fois. Le Conseil procède à l'élection du bureau : Laudier est élu Président, Durand est Vice-Président, et le Docteur Matet occupe la fonction de Secrétaire. Dès cette première séance, le but de l'office est défini : "c'est d'acquérir et de construire des habitations conformes aux règles d'hygiène et au confort moderne, d'en rester propriétaire et d'en assurer la gérance et la jouissance au mieux des intérêts de la collectivité".
Dès la fin de l'année 1922, les premiers terrains sont acquis par l'O.P. d'HBM ; ce sont 423 mètres carrés à l'angle de la route de La Charité et de celle de Saint-Michel-de-Volangis ; sur cette surface, 8 à 10 logements pourraient être construits.

Comme le rappellera Roger Richet, les H.B.M. avaient leur siège au 45 de la rue Moyenne, adossé à l'actuelle perception ; il y avait là un directeur, Louis Martin, et un comptable, Robert Filleux, qui deviendra à son tour directeur quelques années plus tard. Les H.B.M. seront les maisons du boulevard Auger, côté des numéros impairs, puis celles du côté pair, enfin la cité de l'Aéroport, sur laquelle nous reviendrons et plus tard encore, les constructions du Beugnon et du Moulon.

Au cours d'une séance du Conseil d'Administration en date du 12 septembre 1923, Henri Laudier présente Monsieur Henri Sellier, alors secrétaire général de la Fédération des Offices publics d'H.B.M., qui est venu à Bourges "prodiguer ses conseils éclairés et aider au bon fonctionnement de l'Office local", comme le dira le Maire dans un propos d'accueil. En effet, Henri Sellier explique la méthode à suivre pour réunir les moyens financiers ainsi que des éléments précis nécessaires à la constitution des dossiers.
Il y a donc d'importants besoins en logements, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif. La rénovation des anciens quartiers est d'un coût fort élevé. Pourtant la population de Bourges reste relativement constante, si l'on excepte la guerre de 1914 -1918. En 1921, il y avait 45 942 habitants et 45 067 en 1926 ; c'est sensiblement le même chiffre qu'au début du siècle ( 43 587 en 1896, 46 551 en 1901 et 44 133 en 1906). Il est même possible d'affirmer que durant quarante ans, la population de Bourges est restée très stable. L'expansion démographique, comme me l'a souligné Philippe Goldman, ne commencera qu'à partir de 1931.

Le problème du logement à Bourges sera constant pendant tout le siècle. Avec la circulation automobile et ses conséquences, il utilisera beaucoup d'énergie, laissant de côté les aspects économiques de la cité.

LE PLAN D'AMENAGEMENT DE BOURGES 1932

Après la guerre de 1914, le gouvernement imposa à toutes les communes de plus de 10 000 habitants de réaliser un projet d'aménagement, d'embellissement et d'extension, sans toutefois toucher aux plans relatifs à l'alignement et au nivellement. Cette loi du 14 mars 1919 sera modifiée le 19 juillet 1924, et Bourges commencera à l'établir à partir de 1925.
Sur un plan général, le maire va s'adresser ainsi à ses collègues du conseil municipal :
"Le projet devra être conçu en fonction de l'importance de la population et de sa répartition, telles qu'on peut les escompter avec plus de probabilité, grâce à l'observation de l'évolution déjà accomplie, à l'analyse de la situation actuelle et des données qu'on peut avoir sur les facteurs de l'extension future".

Il s'agit donc d'un véritable Plan Directeur, pour reprendre un vocabulaire actuel, et la ville de Bourges, pendant un demi-siècle utilisera ce document mis au point par l'administration Laudier. Ce dernier ajoutera lors de la séance de présentation :

" Le projet a encore et surtout pour but d'éviter pour l'avenir des tâtonnements, des modifications ne tenant pas compte des besoins du lendemain, des initiatives qui, sous la pression de l'opinion du moment, seraient de nature à compromettre la vitalité de la cité, qui, d'ailleurs, a déjà trop souffert de l'exécution incomplète de projets seulement ébauchés et réduits à néant par de nouveaux administrateurs".

Une vision d'un grand modernisme.
Certains, aujourd'hui font remarquer à titre d'exemple que l'opération immobilière Avaricum qui sera réalisée dans les années 1950 était dans les projets de Laudier, tout comme l'idée de l'aménagement du Parc Saint-Paul.

L'étude et la confection du projet seront confiées à Monsieur Payrer-Dortail, pour un prix de 43 350 francs. Le premier reproche des membres des commissions qui auront à l'examiner portera sur l'ampleur du projet. Le développement de la ville est vu dans le futur, d'une manière globale et très ambitieuse, ce qui est assez rare en Berry. Laudier souligne que l'on a toujours "vu trop petit", et cette fois, il regrette qu'il lui soit reproché de "voir trop grand".
La lecture du règlement est assez administrative ; on trouve un programme en deux points :
La réglementation générale d'aménagement
Les prévisions d'alimentation en eau potable et d'assainissement.
Sont traitées les zones d'habitations collectives "limitées à l'agglomération ancienne, au voisinage de la Gare et aux terrains en bordure des artères principales de circulation. Cette zone est définie par une teinte rouge au plan d'aménagement du 5 000e (pièce n° 2)", puis des renseignements plus techniques suivent, comme la hauteur des constructions, les voies privées, les saillies.
Les zones résidentielles font l'objet des articles 18 à 25, ils concernent les clauses d'alignement des propriétés bâties, la surface de la construction par rapport à la surface du terrain, ainsi que les notions de propreté et "d'aspect agréable" des bâtisses. Il est inscrit que "les panneaux-réclames sont prohibés. Ne sont autorisées que les enseignes signalant les commerces exercés dans l'immeuble".

Sur le plan industriel, "sont interdites la création ou l'extension de tous les établissements dangereux, insalubres ou incommodes, classés en 1re et 2e catégories". Des zones pour l'industrie sont définies, comme le territoire entre le canal et la route de Marmagne, à l'ouest du Chemin de fer Economique ; ou celle comprise entre le canal et "la route de Figeac au Sud des usines de Mazières". Elles sont en teinte violette sur le plan d'aménagement. Dans l'article 28, les notions de protection contre les fumées, les mauvaises odeurs, ou les poussières sont évoquées, et l'emploi d'appareils est recommandé.
Dans le titre III, le plan décrit les servitudes hygiéniques, archéologiques et scientifiques de la ville de Bourges :
"L'aspect extérieur des bâtiments devra être conçu dans son style, sa forme, ses matériaux et sa couleur, de façon à ne pas rompre l'harmonie des perspectives urbaines".
Parmi les divers aspects liés au développement de Bourges, il faut souligner le "dégagement de la Cathédrale", une idée qui remontait tout de même à 1852 ..... Au fil des lignes, on voit, par exemple, la suppression du passage à niveau de Saint Privé ; il faudra attendre un demi-siècle pour que cela se réalise, devant le scepticisme de plusieurs élus, Laudier répliquera : "....Dans vingt ans, ou davantage, peu importe, cette suppression ne deviendra-t-elle pas inéluctable ?"

Les problèmes de l'eau potable, puis des eaux pluviales et usées sont pris en considération dans les titres IV et V comprenant la seconde partie de ce document important.
Le projet d'aménagement sera finalement accepté par un décret du Président de la République signé à Rambouillet le 6 septembre 1932 : Bourges entrait dans l'ère moderne.


LES ANNEES 1950 : LOGEMENTS : AVARICUM ET LES CASTORS

Le responsable du service des logements à Bourges est un gaulliste, M. They, il lance le 17 octobre 1950, une opération immobilière qui prendra pour nom "Avaricum". Il est en première ligne des critiques, tant le problème est difficile à résoudre. En janvier 1951, il dresse un état de la situation, rappelant que depuis 1913, on a assez peu construit de logements, eu égard aux besoins, et en plus, les logements existants ont été mal entretenus. Les seules réalisations, d'après M. They, concernent les réalisations des H.B.M., Habitations à Bon Marché.
Il ajoute que les fonds de l'Etat ne sont pas inépuisables, et que le pays doit construire 248 000 logements par an pendant 30 ans, un programme bien ambitieux, et nécessitant de faire appel à des capitaux privés. Il termine ainsi :

"De nos jours, la situation est si grave que nous ne savons pas comment des centaines de familles pourront être logées d'ici à cinq ou dix ans. Et ce ne sont pas les demi-mesures qui pourront pallier cette pénurie".

Bourges manque donc de logements, et un projet prend forme au début de l'année 1951. Il s'agit d'un vaste ensemble d'appartements situés sur un terrain entre les Prés-Fichaux et la rue Mirebeau. Le lieu est un amas de baraquements insalubres, qu'il s'agit de détruire, avant d'engager la construction.

Mais ce projet ne fait pas l'unanimité à Bourges et le premier à s'opposer à sa réalisation est le docteur Delamarre, conseiller municipal socialiste. Il reproche que ce projet soit avant tout "capitaliste" et que ces logements soient destinés à des gens fortunés. Il écrit ainsi une lettre en date du 26 avril 1951 :

"Nous manquons à Bourges, presque uniquement de logements pour ouvriers et employés modestes, or, à ceux-là, vous n'offrez que des baraquements en bois, non conformes au Règlement sanitaire départemental".

Le maire, André Cothenet, va argumenter sa réponse. Il signale que la ville va prendre la responsabilité de réaliser une rue, premier jalon, dont on parle à Bourges depuis 70 ans. Il ajoute qu'il a été convenu, à l'unanimité de la Commission du Logement, que la Société du Cours Avaricum serait purement privée. Mais, sur un projet devant comporter 650 logements, la première tranche qui serait réalisée effectivement par une société privée, ne comporterait que 1/10 de l'opération.
De son côté, Monsieur They, qui s'est senti personnellement visé par les arguments de M. Delamarre, répond "qu'il ne fait pas de différence entre un logement ouvrier et un logement de grand luxe", et il conclut son propos par :
"ce terme de capitalisme m'amuse".

Il faudra des années de palabres, avant de voir sortir de terre des immeubles modernes. Auparavant une cité de relogement aura été construite afin de donner un logement pour les expulsés d'Avaricum, dont le plus célèbre est le peintre berruyer Bascoulard. La municipalité décide l'implantation entre la butte d'Archelet et la cité du Moulon, de 70 logements qualifiés de constructions "en dur". L'accent est mis sur "la rusticité à toute épreuve" de ces logements qui ne devront pas avoir plus de trois étages, et sur le fait qu'il ne s'agit pas de baraquements, mais de "nids confortables et agréables à habiter". Un concours est ouvert pour les architectes et constructeurs, les travaux devant commencer le 1er mai 1953.

Pour mener à bien ce grand projet, en avril 1951, la Ville s'est portée acquéreur de 7 baraquements inutilisés à l'ancien camp de Dun-sur-Auron dans le but de les réinstaller à la Chancellerie.
Ces baraquements ont des dimensions importantes, 30 mètres par 6, et ne sont pas en trop mauvais état. Ils seront placés sur le terrain jouxtant l'école, appartenant à l'Office municipal d'H.L.M. Il n'y a pas beaucoup d'autres solutions. Si certains à Bourges auraient préféré construire des habitations en préfabriqué, les fonds disponibles ne permettent pas deux opérations aussi coûteuses que le déplacement et l'aménagement de 6 baraquements d'une part, et la construction d'autre part de préfabriqués.
Il faudra attendre 4 ans pour que les travaux préliminaires à la construction se réalisent.
Le 25 mai 1955, c'est enfin la pose de la première pierre de la cité nouvelle Avaricum, avec la présence de Monsieur Edgar Faure.
Edgar Faure est le grand homme du moment, il était Président du Conseil, et c'est vers 11 heures que son avion, un "SO Bretagne", se pose à Avord. Il est accueilli par le Préfet, Raymond Vivant, et le Président du Conseil Général, M. Jacquet, ils sont accompagnés du patron de la base, le commandant Bouyer.
En voiture, ils rejoignent le chef-lieu du Cher et, devant la Cathédrale, le "tout-Bourges" attend le Président. Après une présentation du drapeau du 13éme RA, et une "Marseillaise" jouée par la musique municipale de Bourges, Edgar Faure est reçu à l'Hôtel de Ville par le maire Louis Mallet qui prononce des paroles d'accueil :

" Pour la première fois de son histoire, la Ville de Bourges a la fierté de recevoir dans sa maison commune le chef du gouvernement de la République".

Puis le maire évoque Avaricum, Charles VII et d'autres "anciens célèbres". Il termine par le classique cliché de :

"Bourges, une bonne ville du royaume demeurée une bonne ville de la République".

La réponse d'Edgar Faure est tout aussi classique, car après avoir dit qu'il "était heureux d'être ici", il poursuivit cette fois avec humour sur la personnalité de "Jacques Coeur qui était ministre des finances de Charles VII, je viens ici un peu en collègue".


Dans son discours, le maire rappelle que ce projet remonte à 1884, sous le mairat d'Eugène Brisson, et qu'il fut repris par André Cothenet. Mais ce n'est que récemment que ce projet prit une forme définitive. A partir d'un îlot insalubre de 3,5 hectares, comprenant 59 immeubles, logeant 117 familles pour un total de 347 habitants, on va créer une cité moderne.
Après la pose de cette première pierre, il est prévu de construire 8 bâtiments de 32 logements, dont trois seront "entrepris tout de suite". Ils seront disponibles pour des locataires dès le mois d'octobre 1956. Chacun insiste sur le confort des futures habitations, lesquelles comprendront un chauffage central collectif, un ascenseur dans chaque bloc, bref un confort moderne. Un journal local titrera :

300 logements neufs sur ces ruines lépreuses

En effet, en plus de ces logements locatifs, il est prévu de construire un poste de gendarmerie avec 18 logements, un groupe scolaire et un hôtel de 100 chambres. Pour améliorer la situation, l'Yèvrette sera transformée en égout collecteur.

Et ce fut la pose de la pierre par Edgar Faure qui était un orfèvre en la matière. Alors qu'il avait la truelle en main, il se tournera vers Jacques Genton, pour lui dire un mot de circonstance du genre : "ce n'est pas toi qui pourrait utiliser ces outils....", alors que Raymond Boisdé de son côté se fit plus entreprenant déclarant qu'il avait déjà posé pas mal de pierres... Le mot de la fin restera au Président du Conseil qui dira : "J'ai l'habitude, tous les samedis j'en pose une, on dit que c'est ce que je fais de mieux !". Et c'est ainsi qu'il prit la truelle et étala le ciment, après avoir introduit dans la pierre un parchemin qui était en fait le procès verbal de la cérémonie.
Edgar Faure devint plus sérieux en déclarant :

"Je souhaite que cette mise en chantier constitue le départ d'une étape nouvelle dans l'aménagement de cette belle région de France si riche en passé glorieux".

LES CASTORS

Devant une certaine carence de pouvoirs locaux en matière de logements, et surtout l'inertie et la lenteur dans les réalisations, une opération totalement originale commence à se développer, il s'agit de ce que les Berruyers vont connaître sous le nom de "castors".
La crise du logement est telle que toutes les initiatives sont mises en oeuvre. Ainsi, un "Comité Ouvrier du logement" se constitue en 1950 afin de construire sous une forme originale de coopérative, un vaste ensemble de maisons individuelles.

urbanisme a Bourges, les CastorsLe Comité s'adresse à la municipalité de Bourges pour obtenir " une avance des fonds nécessaires à l'achat d'un terrain de 3,5 hectares situé entre Beauregard et la route de la Chapelle". Dans ce courrier, le Comité suggère à la Ville de prendre à sa charge les travaux de voirie, car si aucune aide concrète n'est apportée, la création de logements ouvriers en accession à la propriété "resteront éternellement dans le domaine des rêves".

Le système des "Castors" est à base coopérative, avec une construction par les gens eux-mêmes, en s'entraidant les uns les autres. Les spécialistes estiment qu'il faudra bien 5 ans pour que ces 60 maisons soient terminées.
Pour M. They, :

"la proposition est intéressante, elle procurerait des logements à des ouvriers. Ainsi une partie laborieuse de la population va pouvoir construire. Il faut l'aider. Le système Castor offre un aspect moral incontestable, puisque c'est l'union de chacun travaillant pour tout le monde".

Le débat se poursuit essentiellement sur le plan technique, avec les possibilités d'aider ces gens, d'autant plus que la crise du logement "prend de telles proportions qu'il est envisagé d'installer des baraquements" pour répondre à l'urgence du moment.

A la fin de l'année 1951, les "Castors" sortent de terre rue Guilbeau, et la municipalité acceptera de prendre à sa charge la viabilité qui coûtera une quinzaine de millions de francs. Mais les difficultés ne sont pas terminées, la Nouvelle République rappelle que 23 pavillons individuels vont pouvoir bientôt recevoir leurs occupants, et ajoute que cette opération " n'a pas été prise au sérieux" par les responsables locaux de la ville, il n'y a pas eu d'aide et les terrains devront être remboursés. Le journal conclut sur le mérite des "Castors" qui font l'admiration de tous.

Aussi lorsque Louis Mallet est élu maire de Bourges en 1953, le logement reste le sujet principal de Bourges. Il axe son propos sur les deux points qui lui paraissent essentiels : le logement bien entendu et la circulation dans la ville.

Pour le logement, de nombreux travaux sont en cours :
- la Cité de l'Aéroport qui va permettre de distribuer 64 logements.
- Une cité de relogement va être édifiée à La Chancellerie, les travaux ont été confiés à l'entreprise Leiseing. Au total, et si le Crédit Foncier donne satisfaction à la municipalité, ce sont 96 logements qui devraient être terminés et disponibles à court terme.
- Toujours à La Chancellerie, les H.L.M. ont un projet qui doit sortir "prochainement" avec une quarantaine de logements. Ce n'est pas encore l'immense chantier qui se déroulera dans la décennie 1960.

En y ajoutant les "Castors et autres", ce sont environ 300 logements qui seront disponibles d'ici la fin de 1954.
Mais ce n'est pas suffisant. Le Lycée de garçons, situé alors place Cujas, est en piteux état, et le collège de la rue Jean Baffier est obligé de refouler des élèves, faute de pouvoir les loger. L'Ecole de l'Aéroport nécessite une nouvelle extension, et à Asnières, l'école de garçons doit être construite.....
La situation, 10 ans après la guerre, est critique, il apparaît dans cette période, que les retards dans les constructions à Bourges mécontentent très fortement la population. Ce problème du manque de logements n'est pas propre à Bourges, c'est l'ensemble du pays qui souffre. Les causes sont multiples, à commencer par l'augmentation démographique, ce qui fut appelé le "baby-boom", ajouté à l'exode rurale, et, pour d'autres villes que Bourges, les destructions de la guerre. 1954 correspond au "premier coup de gueule" de l'abbé Pierre.
A la veille de la fin de son mandat, le maire Louis Mallet exposera de manière très synthétique l'évolution du logement et de la politique de construction :

"Dans quelques mois, le quartier Avaricum sera virtuellement terminé avec quelques 300 logements qui succéderont à tous ces taudis dont vous avez certainement gardé le souvenir".

Puis il poursuit avec l'opération de La Chancellerie dont les premières études datent de 1954 :
"Elle est en cours de réalisation, nous sommes sûrs aujourd'hui, que dans 4 ou 5 ans, 2500 logements y seront édifiés avec une population nouvelle de 10 000 à 12 000 habitants".
En fait, la population sera dix ans plus tard du double des premières prévisions.

Mais le logement demande une infrastructure importante, et Bourges se transforme aussi par des actions moins spectaculaires mais fort efficaces. C'est le cas de la construction d'égouts qui aboutira à la station d'épuration située dans la prairie Saint-Sulpice. Une seconde station de pompage a été réalisée dans le quartier de Pignoux pour permettre l'adduction d'eau de la ville nouvelle de la Chancellerie et d'Asnières.
Dans un autre domaine, l'Yèvrette, dont le parcours nauséabond en plein centre ville faisait l'objet, depuis des décennies, de très vives critiques, a été canalisée et "a enfin disparu du ciel berruyer".

Pour la circulation, il faut de toute urgence dégager les rues, et organiser "partout où c'est possible des parcs de stationnement, interdire certains stationnements dans les rues passantes ou trop étroites, et améliorer la signalisation".

LE SECTEUR SAUVEGARDE DE BOURGES

André Malraux va multiplier les initiatives pour défendre le patrimoine du pays. Il sera assez souvent brocardé pour ses ravalements des façades des monuments parisiens.
Une loi en date du 4 août 1962, complétée de ses nombreux décrets, va permettre de définir dans des villes à caractère historique des secteurs qui seront à la fois protégés et subventionnés. On les appellera "secteurs sauvegardés". Une protection particulière et des avantages pratiques devront favoriser la conservation de ses immeubles, de ses rues et places et de ses quartiers. Un architecte-urbaniste, monsieur Socard, a été désigné par l'Etat, qui doit collaborer avec les intéressés. Il existe désormais un système de subventions, de primes et de prêts à taux réduits.
Raymond Boisdé, au début de l'année 1964, va rencontrer André Malraux, afin que Bourges soit bénéficiaire, au même titre que 13 autres villes, des avantages de la loi du 4 août 62.
Le 25 mai 1964, le maire s'adresse ainsi à ses conseillers municipaux :

"La loi apporte une solution générale aux problèmes posés. Elle le fait de façon généreuse parce qu'elle organise tout un système de subventions, de primes et de prêts à taux réduits. Elle le fait d'une manière libérale parce qu'elle respecte le droit d'initiative des particuliers."

Chacun s'accorde pour considérer qu'il faut créer de grandes voies de circulation pour accéder à l'intérieur de la ville de Bourges. L'architecte-urbaniste, doit prendre en charge ces préoccupations.

Et c'est ainsi que la municipalité adopte le projet et définit ce que sera le secteur sauvegardé, avec un périmètre comprenant le boulevard de Strasbourg, l'îlot Saint-Bonnet, la rue Calvin, la rue des Arènes, ..... jusqu'à la cathédrale.
La discussion se poursuit, avec des interventions de Mrs. Cothenet et Depège sur la situation de la Chapelle de l'Hôtel Dieu ou de la Maison de la Reine Blanche, située rue Gambon. Mais ces deux conseillers trouvent que le périmètre est beaucoup trop étendu, ils estiment que cette opération va apporter de nouvelles contraintes et des servitudes supplémentaires.
Par contre chacun a bien conscience qu'il faut que Bourges se débarrasse des zones insalubres, véritables coupe-gorge qui constituent une partie de ce centre historique.
Raymond Boisdé, qui a montré le plan réalisé par l'administration elle-même, pour définir ce secteur sauvegardé, s'inquiète essentiellement de la zone entourant la "nouvelle maternité". Cet édifice, "dont le chantier est resté, disons vulgairement, en panne" dit le maire, va repartir car les étapes administratives, techniques et financières, sans oublier les exigences du Ministère de la Santé, ont été franchies. Avec le secteur sauvegardé, le maire ne se voit pas reprendre des démarches "pendant deux ans", et il conclut :
"nous n'en sortirons pas!"
La discussion va se poursuivre, et finalement, la maternité verra..... le jour.
Le projet, malgré ces oppositions, sera adopté après une dernière intervention de M. Boisdé : "Nous n'avons pas tellement intérêt à restreindre le périmètre, parce que nous priverions certains propriétaires d'avoir des avantages. Et puis, nous sommes les gestionnaires de l'Hôpital, c'est aussi de faire en sorte qu'on n'empêche pas cet Hôpital de s'achever".

Le plan de sauvegarde sera mis au point par M. Julien, Architecte en Chef des Monuments Historiques, et exécuté d'après les conseils de la SO.BE.R.E.M. En définitive, la surface de l'ensemble sera de 58 hectares, et l'opération commencera avec des îlots numérotés 1 et 5. Ils seront délimités par la rue Edouard-Vaillant, la rue Mirebeau et la rue Calvin, pour l'îlot n°1, et par la rue Bourbonnoux, la rue Molière, la rue des Trois-Maillets et le passage Casse-cou pour l'îlot N°5.

Monsieur Carnat, directeur de la SO.BE.R.E.M., évoquera ce plan comme :
"un plan d'urbanisme qui remplace tous les plans antérieurs et notamment annule les plans d'alignement pour ce qui concerne le secteur sauvegardé"
Il ajoute qu'il ne s'agit pas d'imposer, ni d'interdire, mais d'orienter et d'aider les propriétaires. Pour M. Carnat, "il faut commencer par faire une enquête, immeuble par immeuble, afin de déterminer l'intérêt de chacun d'eux, de connaître l'état de vétusté et les possibilités d'amélioration des conditions de l'habitat".

En fait, chacun a bien conscience qu'il est nécessaire d'améliorer la salubrité de ces lieux en donnant des avantages aux propriétaires, ainsi pour monsieur Julien :

"Le secteur sauvegardé est une réhabilitation des constructions anciennes pour lesquelles non seulement on restaure les façades et le gros oeuvre, mais on installe aussi le confort moderne de façon à rendre vivables des constructions que l'on aurait considérées sinon comme trop vétustes pour être conservées et servir à l'habitation telle qu'on la conçoit actuellement".

Il y a dans cette opération, un double objectif, le premier est de permettre de meilleures conditions de confort, le second de mettre en valeur les façades pour des raisons esthétiques et favoriser le tourisme.
L'objectif, rappelle aujourd'hui Jean Pierre Roger, était à l'époque d'avoir un règlement d'urbanisme, avec un périmètre comprenant des recommandations parcelles par parcelle. Il ajoute :
"Il fallait effectivement sauvegarder, et pour cela créer une dynamique de réhabilitation. Le plan Julien comme il était appelé, devait constituer des îlots et favoriser un effet d'entraînement chez l'ensemble des propriétaires. En fait, cette démarche volontariste était finalement très autoritaire. De plus, la procédure était lourde et coûteuse."

Encore faut-il que les propriétaires suivent, mais M. Julien n'est pas inquiet, "évidemment, il y a quelques réfractaires, mais ils sont peu nombreux, et je compte beaucoup sur l'exemple général pour les convaincre".

L'acte de création du secteur sauvegardé sera en date du 18 février 1965.

En réalité, la ville de Bourges n'a jamais approuvé le plan Julien, et il faudra attendre 1978 pour qu'il soit remis en chantier. Les explications sont complexes et multiples. Parmi les premiers reproches, Jean Pierre Roger souligne que Monsieur Julien était un "architecte médiéval", aussi dans le classement des parcelles, il avait coloré en jaune ce qui pouvait être détruit, c'est à dire tout ce qui ne datait pas du Moyen-Age. En particulier l'architecture du XIXe siècle n'avait aucune chance de rester en place. M. Roger ajoute "que les petites cours et dépendances qui servaient aux commerçants berruyers comme des réserves ou des petits entrepôts, devaient être détruits, et si l'activité économique n'avait plus la possibilité de stocker des marchandises, c'est toute la vie commerciale qui disparaissait".

Par la suite, le Conseil Municipal décide, par une délibération en date du 12 octobre 1968, d'engager l'opération de rénovation sur les îlots opérationnels N° 1 et 5, et d'en confier la réalisation à la SO.BE.R.E.M. pour une durée de 7 ans.
Les difficultés inhérentes à ce type de réalisation sont essentiellement dues à une augmentation du coût des travaux depuis 1968, à un démarrage très lent "en raison de la complexité du domaine bâti", et aussi à la volonté de ne pas imposer trop brutalement aux occupants des immeubles concernés, une mutation de leur cadre de vie. Le coût pour la municipalité de Bourges sera considérable, et les conflits pouvant aller jusqu'à des expulsions ne contribueront pas à rendre populaire l'opération.

C'est à cette époque que chacun prend conscience que les dégradations d'un certain nombre de monuments de Bourges sont à combattre. L'exemple du Couvent des Augustins est un cas symptomatique. Cet édifice appartenait à M. Rouzier, lequel avait bien voulu le céder pour un chiffre "ridicule" à la Ville. Il faut dire que le propriétaire avait des charges énormes d'entretien des bâtiments, et la présence de locataires qualifiés "d'hétéroclites" ne facilitait pas la gestion. C'est ainsi que le bâtiment sera restauré, ce dont Raymond Boisdé est très fier :


"... Emmenez maintenant qui vous voudrez dans la cour intérieure de ce Couvent des Augustins, regardez ce cloître, dont les 3/4 restent debout, entrez dans cette salle magnifique où se trouve la chaire dite de Calvin, et vous dites : cela est digne d'une grande Ville".

C'est à partir d'un de ces îlots, celui compris entre la rue Bourbonnoux, le passage casse-cou, la rue Molière et celle des trois maillets que les urbanistes vont mettre à jour la promenade des remparts, dans les années 1980.
Ainsi Bourges commence à s'intéresser de manière soutenue, et avec de bons moyens financiers, à ce "vieux Bourges" qui tombait en décrépitude, sans pour autant négliger, bien au contraire, la construction de logements dans le nord de la ville.

PREMIERE TOUR DE LA CHANCELLERIE

En ce début du mois de septembre 1964, les premiers habitants prennent possession de leur appartement dans la tour de la Chancellerie. La réception de la tour a été faite par monsieur Teinturier, Ingénieur des Ponts et Chaussées, et l'architecte en fut Pison, à ne pas confondre avec Marcel Pinon, l'architecte local des années 1940 à 1960. Cette tour de 50 mètres de haut comprend 13 étages et renferme 78 appartements. C'est en quelque sorte la fierté de Bourges-Nord. Tout autour, d'autres immeubles sortent de terre.
Le plan directeur qui est à l'origine de l'aménagement de la ville datait du 3 mai 1954. Il fut accepté par le Ministre de la Reconstruction et du Logement le 1er septembre suivant. C'est le document qui va servir de base à toutes les opérations d'urbanisme. Cela concerne les îlots à rénover, la protection des paysages, les clôtures, la hauteur des constructions, la déserte des voies etc. Il comprend quatre chapitres et une vingtaine d'articles par chapitre.
La Chancellerie fait partie de ce plan directeur, c'est avant tout un grand projet dont les premières études commencent en 1957, sous le mairat de Louis Mallet. Il s'agissait, une bonne fois pour toute, de résoudre le problème du logement à Bourges et les immeubles qui sortent de terre à Avaricum ne sont qu'une goutte d'eau, par rapport à l'ampleur du problème.

C'est monsieur Bourgeois, Directeur départemental de l'urbanisme et de la reconstruction, qui réalise les premiers plans. Il s'agit de faire des logements avec les commodités dites "normales", à une époque où une salle de bains passait presque pour "un signe extérieur de richesse".

Lorsque l'équipe Boisdé arrive, c'est une aubaine de trouver un tel projet, bien structuré et qu'il faut mener à bien. En septembre 1959, les cultivateurs du plateau dit de la Chancellerie font leur dernière récolte de maïs, avant de laisser la place aux bulldozers.
Cet emplacement, situé au nord de la cité berruyère, avait déjà fait l'objet de différents projets dans l'entre-deux-guerres, sous Laudier, pour étendre le périmètre de la ville. La cité du Moulon avait en conséquence vu le jour.

Deux quartiers sont définis sur une surface de 165 hectares, avec La Chancellerie et les Gibjoncs. Le plan de masse a été étudié par M. Pison, architecte à Paris, sur l'initiative du Ministère de la Construction. Pour l'ensemble du projet, il y aura 4000 logements, un Lycée de garçon, un Parc des sports pour la ville et éventuellement une nouvelle caserne de gendarmerie.

En 1958, lors des élections municipales, le coeur du débat concerne cette ville nouvelle. Les logements sont prévus comme une grande cité, au centre de laquelle une grande place, comme dans toutes les villes, et, autour, les magasins, un marché couvert, une salle de réunion, un groupe scolaire et une salle paroissiale.

Dans un premier temps, la tranche 1 comprendra 1800 logements pour la période 1959-1963, alors qu'une seconde tranche de 1500 logements sera construite de 1964 à 1968.
En attendant, il faut réagir et c'est immédiatement qu'une centaine de logements sortent de terre, ils vont servir à terminer le relogement des habitants du quartier Avaricum. L'équipement d'un terrain sur lequel sera bâti 300 maisons individuelles va être entrepris.

Avec les premières présentations du projet, arrivent les premières critiques, l'architecte en chef Guy Pison se défendra :

"Ce n'est pas une cité dortoir, c'est un quartier de la ville où l'on retrouve le commerce de première nécessité et les équipements sociaux d'une ville moderne".

Les premiers coups de pioche sont donnés en février 1961, pour des logements livrés à la fin de l'année, alors que le centre commercial ouvre ses portes en septembre 1963, donnant ainsi à ce quartier les premiers éléments lui permettant de vivre.

On construira le plus long immeuble de Bourges avec une bâtisse de 167 mètres de longueur, permettant d'abriter plusieurs centaines de personnes.
La SO.BE.R.E.M. réalise cette opération qui porte sur 116 hectares et 4935 logements, comportant 7 zones.

Le quartier de la Chancellerie va pousser comme un champignon. On dénombrera dès 1963, près de 5000 habitants pour atteindre en 1976, à la fin de l'opération, un chiffre considérable de 29 221 personnes. A cette époque, cela représente 35% de la population berruyère.
Les promoteurs de Bourges-Nord, en 1959, pensaient à loger les Berruyers qui habitaient dans des appartements insalubres et qu'il fallait reloger, mais nul ne songeait que la fin de la guerre d'Algérie allait apporter un flot de rapatriés qu'il faudrait installer en toute urgence.

Raymond Boisdé s'intéresse beaucoup à Bourges-Nord, en 1966, il fait remarquer "qu'il ne s'agit pas d'une ville différente, d'une ville neuve, mais d'un quartier, d'un quartier de notre grande commune".

En mai 1967, on pense à installer un château d'eau, pour lequel le maire est très circonspect, d'une part pour une telle dépense, mais surtout pour sa construction en raison de l'esthétique toujours discutable d'un château d'eau. Le choix se fera sur un réservoir métallique comme celui qui est implanté à Mantes-la-Jolie. Le débat sur le "champignon" va occuper les conseillers, car si monsieur Arquinet voit dans cette forme évasée un ensemble acceptable, il trouve que la peinture, à l'usage, va faire une dépense et une charge importante. Boisdé s'est toujours opposé à cette construction, et cela fait 4 ans qu'il tergiverse. Comme André Cothenet trouve qu'on ne peut pas indéfiniment retarder la construction de ce réservoir, finalement, entre le béton armé et la construction métallique, c'est cette dernière technologie qui est choisie. Boisdé aura le dernier mot : "comme ingénieur, je ne peux pas en dire du mal".

Pour les spécialistes de l'urbanisme, il apparaît aujourd'hui que le plan global de La Chancellerie était assez remarquable. Jean Pierre Roger affirme "qu'il y avait une véritable unité de construction, que les immeubles étaient en pierre de taille d'excellente qualité ". Par contre si la plupart des immeubles ne comprenaient que 4 étages, il faut ajouter que l'on a aussi construit des immeubles qui n'étaient pas prévus sur les plans d'origine !

A l'inverse, l'urbanisation du quartier des Gibjoncs apparaît comme beaucoup plus déstructuré, l'urbanisme n'est plus en Z.U.P., ce n'est plus la même réflexion, et les immeubles sont davantage posés les uns à côté des autres.

Hormis le complexe de La Chancellerie, d'autres opérations immobilières voient le jour. C'est ainsi qu'un autre quartier se construit à Vauvert, avec 87 pavillons et 58 logements. Il est prévu de terminer l'opération dans l'année 1965. L'architecte est M. Audureau et les logements sont construits en "accession à la propriété" avec l'aide financière du Crédit Foncier de France.
Par rapport à ce qui se fait à Bourges Nord, le concept est totalement différent. Ce sont des pavillons individuels, et de petits immeubles de 1 ou 2 étages maximum, et la publicité de leur vente insiste sur ce nouveau quartier qui est "un milieu calme, aux portes de l'agglomération".

On construit à Bourges pour les vivants, mais on n'oublie pas les morts, c'est ainsi que le problème des cimetières est posé. A Bourges, il y a le vieux cimetière central des Capucins, en plein Centre-Ville. C'est le seul rescapé de la Révolution. Depuis, ont été construits les cimetières du Lautier, puis de Saint Lazare et cela ne suffit pas.

Par lettre du 3 décembre 1958, le Préfet du Cher fait connaître à la municipalité que les études sur l'aspect hygiénique sont sur le point de se terminer. Le risque de contamination du forage de Saint-Ursin est très limité disent les experts, à condition de ne pas exploiter le forage à son maximum de débit..... Ce qui est rassurant !


Le PLU de 2006 = Plan Local d'Urbanisme

C'est pour succéder au POS, (Plan d'Occupation des Sols), plan d'urbanisme qu'est mis en oeuvre le PLU, Plan Local d'Urbanisme par une délibération du Conseil municipal du 19 juin 2003.

Véritable réflexion sur le présent et le futur de la Ville, le Plan Local d'Urbanisme a été adopté fin mars 2006 par le Conseil Municipal. L'objectif est de tracer un projet de ville réaliste et audacieux en prenant compte des évolutions démographiques, socio-économiques et urbanistiques.

1- Historique


La Ville de Bourges avait décidé de mettre en oeuvre un Plan Local d'Urbanisme (PLU), par délibération en date du 19 juin 2003.

Une concertation a été mise en place tout au long de son élaboration :
- Un registre était notamment à disposition du public, de juin 2003 à mars 2004.
- Entre huit cent et mille personnes ont été accueillies et renseignées par la direction de l'urbanisme.
- Cinq réunions publiques ont par ailleurs jalonné cette procédure.

En avril 2005, un dossier présentant le projet de Plan Local d'Urbanisme a été transmis aux partenaires afin de recueillir leurs avis.

Puis, pendant trois mois, les personnes publiques ont à nouveau pu s'exprimer sur ce PLU.

L'enquête publique a été organisée du 23 janvier au 22 février 2006. Un commissaire enquêteur désigné par le Tribunal Administratif, a reçu la population par cinq fois.

Le commissaire a donné un avis favorable avec uniquement trois remarques techniques portant sur la zone tampon entre l'aménagement faisant l'objet d'une ZAC avenue du Maréchal Juin et les propriétés riveraines, la densité en zone Nh considérée comme étant trop faible surtout dans le cas de petites parcelles, et l'existence d'un emplacement réservé pour un terrain de sport chemin de Villeneuve.

Le Conseil Municipal du mois de mars 2006 a adopté le PLU.

2- Que dit le PLU de Bourges ?

L'accent est mis sur l'environnement et sur l'économique.

- Environnement :
- importance des réserves de zones naturelles prise en compte
- préservation des marais : règles de construction des cabanes…

- Déplacements :
- Poursuite des liaisons douces entre les quartiers et entre communes. Il s'agit de marquer une volonté de cohésion urbaine.
- Enrichissement du réseau cyclable

- Renouvellement urbain :
- Ouverture de la Zone de la gare, côté nord. Ce projet, véritable élément du projet de renouvellement urbain, vise à atténuer les ruptures physiques dans la ville et à rechercher une meilleure cohésion urbaine.
L'ensemble des réalisations du Projet de Renouvellement Urbain vise à harmoniser les constructions et réhabilitations dans les quartiers concernés.

- Afin que Bourges demeure une ville à taille humaine, les hauteurs des constructions collectives ont été réduites et la mixité sociale dans les nouvelles constructions mise en avant.

- Développement :
-
Une augmentation considérable du bâti est prévue, puisqu'il passe de 190 à 430 hectares sur l'ensemble de la ville.
- Des zones d'aménagement ont été prévues près du Pipact ou encore des Quatre vents.

- Entrées de ville :
- Les dispositions du PLU permettent de protéger le paysage des entrées de ville.

à suivre

Retrouvez quelques articles de l'Encyclopédie :
Ils sont nés à Bourges,
François Mitterrand à Bourges
Chiffres essentiels
Les Templiers
Les élections à Bourges au XXe siècle
Les Très Riches Heures du duc de Berry
les villes jumelles
Radios locales
Les francs-maçons
Kiosque et musique
Agnès Sorel
L'horloge astronomique
Les tramways de Bourges
L'Yèvre à Bourges
L'alchimie
La Bouinotte, magazine du Berry
L'usine Michelin
La maison de la Reine Blanche
Serge Lepeltier
L'industrie à Bourges au XXIe s
Monuments Historiques Classés
 

Et puis une nouveauté : L'information et l'actualité à savoir sur Bourges, en quelque clip et quelques lignes :

http://www.bourges-info.com/

 

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