Jacques Thiboust- Histoire de la Renaissance a Bourges - Roland Narboux - Bourges Encyclopédie

 

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 JACQAUES THIBOUST OU LA RENAISSANCE A BOURGES

Une histoire d'un personnage peu connu à Bourges, c'est un homme de la Renaissance , né à Bourges et un grand intellectuel du XVI ième siècle.


L'Histoire de Jacques Thiboust (1492-1555),

Notaire et secrétaire de François Ier, seigneur de Quantilly près de Bourges. Bibliophile.

avec l'aide de Françoise Michaud-Fréjaville

Jacques Thiboust est né à Bourges en 1492, c'est un homme de la Renaissance, particulièrement peu connu à Bourges alors qu'il fut secrétaire du roi François 1 er et un intime de sa sœur, Marguerite de Navarre.
Il est le fils d'un bourgeois, Thomas Thiboust. On ne connaît pas comment se sont déroulées ses études, sinon qu'il e a fait une partie sans doute à Bourges et l'autre à Paris.

Une devise : Lex et Regio.

Il fut seigneur de Quantilly.

Il se marie avec Jeanne de La Font qui écrivait semble-t-il des poèmes. Et ils eurent trois filles qui feront des mariages dans le même milieu que leurs parents.

On connaît de lui un rôle prépondérant dans la rédaction de la Coutume datée de 1539.

Mais ce fut avant tout un des grands intellectuels de l'époque de la première renaissance à Bourges, avec de fortes relations avec des humanistes qui sont passés par Bourges, il y aurait eu des échanges d'ouvrages.

Il sera sans doute un intime de Jacques Colin, le célèbre abbé de l'Abbaye Saint-Ambroix, .

Il publie le célèbre " Mystère des Actes des apôtres ", cette pièce en vers des frères Gréban qui fut jouée dans les arènes de Bourges en 1536.

A Quantilly, il construit une chapelle dans son château.

A sa mort, en 1555, Jacques Thiboust fit don de son œuvre, sans doute importante au dioèces de Bourges, ce qui a permis d'en retrouver les traces.

En savoir plus :

" Carte du diocèse de Bourges " dédié à la duchesse Marguerite de Navarre en 1545

Archives départementales du Cher G 61

Travaux de Françoise Michaud-Fréjaville :
- Le Berry au temps de Jacques Amyot, aspects économiques et sociaux.
- Jacques Thiboust, plantes à Quantilly (in Flaran N°9) 1989
- Cahiers d'Archéologie et d'Histoire du Berry (hors série de 1996)
- Traditions et innovations horticoles en Berry dans Flore et jardin de 1997.


En savoir plus

H. Boyer, "Ménage littéraire en Berry au XVIe siècle (Jacques Thiboust & Jeanne de la Font)", Mémoires de la Commission historique du Cher, 1, 1860, p. 97-174 (http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5568071d/f109) (Source : Biblissima)


H. Boyer, "Ménage littéraire en Berry au XVIe siècle (Jacques Thiboust & Jeanne de la Font)", Mémoires de la Commission historique du Cher, 1, 1860, p. 97-174 (http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5568071d/f109) (Source : Biblissima)


Poète berrichon. - Notaire et secrétaire du roi François Ier puis de Marguerite de Valois. - Époux de Jeanne de la Font, poétesse. - Devise : "Qui voyt s'esbat" (Source : BnF)
Jacques Thiboust (1492-1555), notaire et secrétaire de François Ier, seigneur de Quantilly près de Bourges. Bibliophile. (Source : Initiale)
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Documents écrit par la " principauté de Boisbelle "

Jacques Thiboust: Né à Bourges en 1492 fait une formation juridique qu'il met au service du roi François Ier, puis de sa soeur Marguerite de Valois, duchesse d'Alençon et de Berry, future reine de Navarre. Il était notaire et secrétaire du roi. Il anima un cénacle Berrichon. Thiboust était noble par sa charge et donc avait son blason. En effet c'est Charles VIII qui par lettres de février 1484 déclara ses secrétaires nobles. Toutefois, pour qu'il fut anobli par sa charge, lui et sa postérité, il fallait que le secrétaire du roi en mourût revêtu eu qu'il ne s'en démit qu'après un exercice de vingt années. Il avait rang de chevalier et était considéré comme ayant quatre quartiers de noblesse. A ce titre il avait droit de franc-fief et nouveaux acquets c'est à dire pouvait acquérir des biens nobles sans payer les droits auxquels les roturiers étaient assujettis en pareil cas, c'était là du reste un privilège que possèdaient les habitants de Bourges, par concession formelle que leur en fit Charles VII en 1437.

Jacques Thiboust se maria avec Jeanne de La Font 1521, Jeanne qui à la beauté et à la fortune unissait non seulement l'esprit naturel mais encore les avantages de l'éducation la plus soignée qu'une femme pût recevoir à cette époque; celle là même que ses contemporains ont signalé comme une muse et ses amis pleurée comme une Grâce. Elle était simple sans pédanterie, d'une galanterie discrète; elle cultivait avec succès les arts, la littérature, la danse, la musique vocale et instrumentale, faisait des vers et séduisait par une conversation entrainante.

Le cénacle de thiboust réunissait des officiers de chancellerie, des étudiants d'université, des financiers, des médecins et clercs locaux. Cela confirmait que le milieu des notaires et secrétaires du roi, par son dynamisme et son ambition perpétue la tradition médiévale qui en fait depuis Philippe Le Bel , un vivier culturel intense et en perpétuel renouvellement. On comptait dans son cénacle Jacques Colin , Guillaume Bochetel, Jacques Le Roy, François Habert et le poète Clément Marot.

Jeanne La Font mourut après onze ans de mariage en août 1532 à la suite d'une courte maladie; elle fût ensevellie en l'église de Quantilly, ou son mari lui fit élever une tombe.
Jacques Thiboust entame une carrière de mécène qui ne cessera qu'à sa mort en 1555 il fut inhumé en L'église de Quantilly avec son épouse Jeanne de La Font.

https://www.domaine-de-principaute-de-boisbelle.fr/notre-r%C3%A9gion/quantilly/


Quelques éléments complémentaires

https://francearchives.fr/facomponent/1211a10dc1f30648a9d0d17bd1f87b4043ef178d

Saint-Palais et Quantilly : " Pancarte des advoeux nommées et dénombrements, acquisitions, quictances, recongnoissances et autres lettres, Tiltres et enseignesmens... deuz chacun an au seigneur de Quantilly... ". 1387-1538
Fos 2-6. Table des noms et "surnoms" des personnes tenant des héritages du seigneur de Quantilly.

F° 9vo. Notes du seigneur de Quantilly, Jacques Thiboust, relatant que, le 24 septembre 1524, le château de Quantilly a été "géométriquement silogisé" par Jean Du Pré et Jean d'Amboise, maîtres maçons de Bourges, et donnant des renseignements sur les plantations de la chênaie et de la vigne dudit château de Quantilly. -

F° 10. Mandement, donné par le roi François Ier, à la demande de Jacques Thiboust, "au bailli de Berry ou son lieutenant", de désigner des notaires du bailliage pour dresser le terrier de la seigneurie de Quantilly (Blois, 18 mai 1524). -

F° 11. Commission, donnée par Nicolas Bigot, lieutenant général du bailli de Berry, aux notaires Jean Hémetou, Antoine Doulceron, André Gassot et Antoine Dumoulin pour dresser le terrier de la seigneurie de Quantilly (s. d.). -

F° 12vo. Insertion, à la demande de Jacques Thiboust, du 16 mai 1525, des privilèges royaux par lui obtenus au sujet des foires de Quantilly. Les documents insérés sont :

1° des lettres de Louis XII, données à Blois, au mois d'octobre 1507, créant, à la demande de Jean Rogier, le jeune, seigneur de Quantilly, deux foires franches audit lieu de Quantilly, savoir : l'une, le 20 juin, et l'autre, le 3 février ;

2° des lettres de François Ier, données à Blois, en mai 1524, et créant, à la demande de Jacques Thiboust, deux foires franches audit lieu de Quantilly, savoir : l'une, le 30 septembre, et l'autre, le 13 décembre ; à la suite de la transcription, figure la mention que ces deux actes ont été collationnés par les notaires Doulceron et Mayet, le 20 juin 1531. -

F° 14. Département des terres des Brosses ou terres franches. Lettre de Me Jean Rogier, le jeune, à Me Jean Vesse, bailli de Quantilly, son neveu, pour lui demander la façon dont doit se faire le partage des terres franches qu'il venait d'arpenter (Quantilly, vendredi). -


 

1 A

 

rch. dép. Cher, G 48, f° 1-15. La seigneurie fut vendue pour 5820 l.t. Quantilly : Cher, canton d (...)
2 Ibid, f° 16 : "vraie et réelle possession et saisine... du chastel et maison forte... et des trois (...)
1Le 26 avril 1524, Jacques Thiboust, notaire, secrétaire de la duchesse de Berry, Marguerite de Navarre, élu de Berry, et sa femme Jeanne La Font, achetaient aux héritiers de Jean Rogier la seigneurie de Quantilly1. Ils en prenaient possession le 4 mai2, et le 24 septembre de cette même année, deux maîtres maçons de Bourges vinrent procéder à l'arpentage du château. A l'automne de 1525, le nouveau maître fit semer une chênaie bordée d'une châtaigneraie, et planter une partie de la vigne ; en décembre fut constitué le verger. Enfin, l'année suivante 1526, un buisson fut semé de glands et de fruits sauvages, la vigne complétée et une garenne établie.
3 Hippolyte BOYER, Un ménage littéraire en Berry au XVIe siècle : Jacques THIBOUST et Jeanne de La F (...)
4 G 60, f° 9 v°.
5 G 61, f° 122 à 127 v°.
2Le couple des seigneurs de Quantilly se piquait de bel esprit3, nous sommes à l'époque de la splendeur des humanités à Bourges, du séjour de J. Amyot, et l'avocat et secrétaire de la duchesse eut été peut-être surpris, mais pas forcément vexé de me voir me pencher sur ses activités agrestes. En effet c'est par une note de sa propre main, dans un des beaux registres que le hasard nous a conservés, que nous apparaît pour la première fois son activité de reboiseur : il précisait les plants de vignes de son petit clos4. Plus tard, son propre secrétaire reprit et augmenta cette notation dans le grand volume terrier de la seigneurie5.

Agrandir Original (jpeg, 235k)
Quantilly : Extrait de la carte de Cassini.

Agrandir Original (jpeg, 195k)
Quantilly : Plan de situation (vers 1790)(Arch. dép. du Cher, XXII, 393)
6 G 49, no 4 : En 1533, le Parlement confirma la répartition du produit de la vente des bois abattus (...)
7 J. THIBOUST obtient des plants du greffier des élus d'Orléans, du receveur des aides d'Anjou, de l (...)
3Prenant donc la possession d'un vieux domaine, qui avait à un moment appartenu à la famille des Cœurs, les nouveaux maîtres firent procéder à l'aménagement des jardins et vergers de leur nouvelle demeure. Les raisons en sont multiples : la région est, par sa nature même, boisée, les plateaux crétacés qui surplombent les vallées de l'Yêvre et du Cher portaient et portent encore de vastes couvertures forestières : forêts de Saint-Palais, de Hautebrune, de la Salleroy, de Boisbelle, de Mennetou. Une tradition encore vivante appelle les habitants les "Forêtins"... Au cours du mois de juin 1522, un terrible ouragan avait ravagé ces grands massifs : les archives de l'archevêché évoquent les ventes d'arbres abattus, les travaux de déblaiement6, il fallait reconstituer, tout au moins en partie, cette richesse détruite. Enfin, il me semble que le goût même de J. Thiboust le portait à se pencher sur l'édification d'un paysage bien ordonné, à échanger avec ses collègues des provinces alentour des renseignements ruraux et des cépages délicats, à nouer par le biais des flatteries agrestes des relations avec le clergé berrichon7.
8 G 28, f° 4.
9 G 61, f° 97.
4Le souci de notre élu fut de créer autour de sa maison un paysage jardiné, net ; malheureusement on ne sait pas grand chose des parties "annuelles" du jardin : légumes et fleurs, périssables ne sont pas enregistrés pour la postérité... Pourtant il est certain qu'un potager existait : il est déjà cité dans l'acte de vente : "...Un grand lopin... ouquel lon plante les courtillages et les violettes"8 ; il apparaît également à travers la notation des "Temps et saisons des semences de toutes graines et quand il faut les replanter"9 où sont reprises des indications sur les mois et les lunes vieilles et neuves. Je ne pense pas que ces listes de légumes aient été tirées d'un ouvrage d'agriculture qu'aurait possédé notre avocat, il n'aurait pas été besoin de les reporter avec tant de soins sur un aussi beau parchemin. Dans la mesure où elles ne concernent que des plantes susceptibles de pousser sous le climat berrichon (choux, oignons, persil, courges, bettes, laitues) et où les dates de semis correspondent parfaitement aux possibilités de l'endroit, j'inclinerai à penser que nous nous trouvons devant la transmission orale des coutumes locales.
10 ...Quaesumus ut quod in nomine lui plantamus aut instituimus convalescat, crescat, multiplicet et f (...)
11 "Les Sardonnes sont celles qu'on appelle à Lion marron, congneues par toute la France pour le traf (...)
5La reconstitution d'une "forêt" proche fut donc le premier travail : le nouveau massif tenait au fossé nord-est de la basse-cour du château : un travail de labour fut suivi de la semaille de 22 boisseaux de glands que l'on était allé chercher dans les forêts proches de Mennetou et de Boisbelle : même terrain, même climat, mêmes races d'arbres : toutes les garanties pour une reprise sans perte. Si on y ajoute la prière à dire, dûment collationnée aussi en fin de description, tous les espoirs étaient permis10. Autour de cette futaie en devenir et marquant une limite continue devaient croître des châtaigniers ensemencés avec des marrons de Lyon (il s'agit de châtaignes franches, dites Sardonnes ou marrons de Lyon)11. On espérait donc obtenir un paysage organisé : de beaux fûts, enclos d'une ceinture d'arbres fruitiers forestiers.
6Le plant de vigne lui aussi faisait partie du paysage visible depuis le château ; son ordonnance obéissait à la rigueur des plates-bandes potagères : un terrain carré, d'environ 100 m de côté, coupé en quatre parties par des allées d'arbres fruitiers, en tout 1 arpent 1/2 (ici : 0,9409 ha). Chaque quartier avait sa couleur et ses cépages consédérés comme des plantes précieuses - nous trouvons déjà ici ce qui est exprimé plus tard par O. de Serres : "telles espèces seront séparément plantées et distinguées par longs quarreaux séparant la vigne, accompagnant le naturel de chaque espèce". Le caractère quasi-expérimental de cette plantation, plaisir des yeux et de l'esprit autant que satisfaction future du palais, est clairement indiqué par le soin pris à minutieusement noter par deux fois "l'ordre du plant de la vigne". Quels seraient les cépages qui donneraient leur meilleur après acclimatation ? Chaque carré fut donc divisé en lots de provenance variée. Le premier de raisins rouges portait des ceps de Beaune, et du coteau berrichon de l'Yêvre (Turly), le second d'Anjou et de Marche (cultivés près d'Argenton) ; dans les deux cas le complément était fourni par des plants provenant des autres vignes de J. Thiboust : celle d'Orléans (Saint-Privé) et "du pays même" c'est-à-dire Saint-Georges-sur-Moulon. On peut raisonnnablement penser que l'Auvernat, le Gamay et le Pineau noir fournissaient la quasi-totalité des cépages. Le raisin blanc (Sauvignon), venait de Sancerre, cadeau de l'abbé de Saint-Satur, et des vignes d'Issoudun (Meslier et Cabas d'Issoudun, Pineau gris) que possédait notre élu à SainteLizaigne et était complété par les plants locaux. Hélas, nous n'avons aucun résultat, ni qualificatif ni quantitatif, de ces sélections.
12 Pierre de CRESCENT (Pietro dei CRESCENZI), Le livre des prouffits champêtres et ruraux, Paris, 151 (...)
7Enfin, viennent les fruits du verger. Deux essais furent tentés afin de disposer, dans l'avenir, d'une agréable variété dans les corbeilles, une plantation "sauvage" et une autre sélectionnée. La première, conçue pour donner naissance à un paysage et des produits "naturels", fut placée près de la chênaie-châtaigneraie : on sema pêle-mêle des glands et tous les fruits sauvages du pays : "chastaignes... pommes, poires, nesfles, alizés, nozilles, aiglantiers" avec le souci de se procurer ainsi des franc-pieds à greffer solidement acclimatés. C'est pourquoi le secrétaire du sire de Quantilly se renseigna auprès du gouverneur du comte de Sancerre, dont la bibliothèque devait comporter un ou des ouvrages d'agronomie sur la pratique des pépinières. Une page entière est ainsi consacrée à suivre le processus depuis le marc des fruits pressés, jusqu'à la greffe - exclue. Il s'agit d'une libre application de Pierre de Crescent,12.
13 Acte de vente, G. 48, f° 4.
8Mais le vrai verger, qui ne pouvait attendre la croissance de petites graines, fut planté d'arbres déjà greffés, transplantés d'une bâtardière. La raison qui les fit venir de Tours et qui donna le nom de Touraine au quartier où ils furent plantés ne m'est pas connue - le rôle de Tours comme marché de plants n'est pas signalé par B. Chevalier - et vient peut-être des déplacements professionnels de notre élu. Je ne vois pas bien pourquoi J. Thiboust méprisa le verger existant où il y avait "si grosse quantité de cerisiers, pommiers, noyers et pruniers que a peine le soleil peut luyre sur les pois et les febves que l'on y sème"13. Ne pouvait-on trouver sur place porte-greffes et greffons ? Tous les livres d'agronomie insistent sur la nécessité de raccourcir au maximum le temps entre arrachage et replantation ; espérons que la motte de terre "de Touraine" fut suffisante pour la reprise en dépit des longueurs relatives du voyage.
14 Voici les espèces données par le texte : Pommes : Courtpendu (la variété Rosat en est citée dans l (...)
9L'achat fut considérable : au moins deux cents arbres... La disposition semble soigneusement pensée, même si je ne peux en déterminer les raisons précises. Pour le plaisir de l'esprit on enferma le verger dans un cadre de même espèce - comme on l'avait fait de la chênaie -, ici des poiriers d'hiver, dont l'allure est effectivement souvent majestueuses : "à l'entour, sont tous poiriers de Bon-Chrétien, Champvergnant et autres bonnes poires". Ainsi furent délimitées quatorze rangées comportant en moyenne onze ou douze arbres. Les rangées sont décrites une à une, parfois sommairement : "le premier poirier est de Petit Admiral, après sont pommiers... et au bout y a un poirier de Champvergnat" (9e rang), parfois comme celle qui faisait la bordure du jardin, avec une totale précision : dix variétés pour onze arbres... La rigueur, donc, n'est en fait qu'apparente et l'on enrage de ne pas savoir le nombre précis des arbres pour toutes les rangées. Nous savons par l'expérience que les pommiers sont plantés moins serrés que les petits pruniers et les pêchers : comment se représenter pourtant un 4e rang qui ne comptait pas moins de vingt-quatre arbres - deux poiriers, dix-sept pruniers et cinq pommiers - sur la même longueur que les deux poiriers et les huit pêchers du deuxième rang ? Il faut exclure une plantation rigoureusement en quinconce, satisfaisante pour les perspectives mais ici irréalisable. Il a fallu également renoncer à un arrangement symbolique : nulle figure, aucun labyrinthe ne se dévoilent si l'on tente de matérialiser par le dessin les groupes d'arbres. Quant aux exigences sexuelles des plantes, elles se révèlent peu opératoires : la majorité des espèces données est autofécondante... Pour résumer, le verger comportait cinq rangées complètes de poiriers, trois de pommiers, une de pruniers, deux de pêchers, les autres mêlaient pommes et amandes, prunes et pommes. Les poires offraient dix-huit variétés, les prunes cinq, les pommes seulement trois ; quant aux pêches elles étaient rouges ou blanches, sans nom déterminé. Un rang réserve sa surprise pour la première récolte : "il n'a point de nom jusqu'à ce qu'on en veroye le fruict !"14.
15 ..."Et n'a mon œil failly/de préférer ce lieu de Quantilly/aux beaux jardins que Pomone sceut culti (...)
16 G. 53, no 11, 12 : bail par Etienne Bigot, (second époux de Marie, troisième fille de J. THIBOUST) (...)
10De ce verger, de ces vignes, nous n'en voyons, pour notre part que les promesses ! Les efforts de J. Thiboust ont-ils, avec et sans jeu de mot, porté leurs fruits ? La réponse d'entrée de jeu est positive. En ce qui concerne la beauté et le charme du lieu, J. THiboust n'était pas loin d'avoir recréé les jardins de l'Académie ! Ses correspondants, tout au moins le suggéraient15. Plus prosaïquement l'absence de comptabilité pour Quantilly au XVIe siècle ne permet pas de mesurer les récoltes, mais en 1580 la seigneurie fut donnée à bail pour un an moyennant 340 écus, et trois sommes de pommes et de poires, une somme de mesles - ici des nèfles, sans jeu de mots ! -, des châtaignes, et des fruits cuits16. Le verger existait donc encore et avait même sans doute été peu à peu totalement renouvelé car pêchers et amandiers ne vivent pas très longtemps...
17 Jean CHAUMEAU, Histoire de Berry, Lyon, 1566, p. 251.
18 A. VACHER, Le Berry, contribution à l'étude géographique d'une région française, Paris, 1908, p. 4 (...)
11Dans un second temps je voudrais peut-être un peu rêver... A partir du XVIe siècle les descriptions géographiques de cette région de la "Forêt" insistent sur les arbres fruitiers. Nicolay et Chaumeau, vers 1560, évoquent ce pays "enrichi d'une infini multitude d'arbres fructiers qui produisent toutes manières de fruicts à grandes plantes : comme poyres, pommes, perches, prunes"...I17. La carte de Cassini indique à l'est de la forêt de Salleroy, "arbres fruictiers". Au début de notre siècle, Vacher écrivait : "toute la forêt n'est qu'un verger, ce sont les arbres fruitiers qui sont la vraie richesse des Forêtins. Ils sont plantés en plein champs, séparés par des distances de 10 à 15 m au plus - ce qui correspond aux 3 à 4 toises du XVIe siècle - et leur nombre n'a d'égal que la variété"18. Enfin, rappelons qu'avant les désastres du feu bactérien le canton de Saint-Martin d'Auxigny était le plus gros producteurs de pommes de France (40 000 t en 1979), certes la Golden avait remplacé la Courtpendue et la Giraudet et nous quittons le domaine du domestique pour celui de la culture spéculative. Mais il me plaît de penser que l'impulsion d'une culture arbustive non plus spontanée mais raisonnée et de qualité fut donnée par Jacques Thiboust, dans son enclos expérimental de Quantilly.
NOTES
1 Arch. dép. Cher, G 48, f° 1-15. La seigneurie fut vendue pour 5820 l.t. Quantilly : Cher, canton de Saint-Martin-d'Aux

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Sylvie Le Clech. Jacques Thiboust, notaire et secrétaire du roi et familier de Marguerite de Navarre : amitiés littéraires dans le Berry du "Beau seizième siècle". Cahiers d'archéologie et d'Histoire du Berry, Société d'archéologie et d'histoire du Berry, 1989. ?halshs-01720911?

 


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